LA FUITE AUX AGRIATES

 

Violences pour violences Ferranti écrit la Corse contemporaine

Mis en ligne le 25/10/2000 à 00:00 6 Pascale Haubruge

 

La Corse contemporaine a ses écrivains. Marie Ferranti est du nombre, qui avec «La fuite aux Agriates» évoque tout à la fois l'amour, les beautés sauvages et les violences de l'île où elle vit.

Au coeur de ce roman cogne un amour interdit. Francesca et Marie sont soeurs. La première, fougueuse aînée, préférée du père mort, aime le mari de la seconde, plus posée, et proche de sa mère. Elle l'aime passionnément, mais se fiance tout de même avec Pierre le volage, compagnon de lutte de Julius, ledit mari de Marie.

Quand tout sera fini, qu'on comptera les morts et les presque plus vivants, quand le nom des victimes sera dans le journal, Clorinde, nourrice de Francesca et leader du choeur des femmes, dira que sa protégée devait accomplir son destin - aimer jusqu'au bout le berger aux yeux clairs. Elle ne pouvait y échapper.

L'impérieuse payera cher son amour indomptable. On le cons- tate dès le début de «La fuite aux Agriates», sans y comprendre tout. Et la romancière de composer un récit dense allant jusqu'au coeur du drame, à rebrousse-poil.

Il y a de la tragédie dans l'air. Tout le talent de Marie Ferranti est ne pas le souligner au crayon gras. Elle trace des lignes, noir sur soleil, dans le désert des Agriates, pour écrire comme dans l'urgence son histoire d'amour et de mort.

Attraction des corps. Secrets de famille. Beauté saisissante d'une jeune femme libre. Passion que rien ni personne n'arrête. Lutte corse armée. Attentat. Crime. Repli dans le maquis. Traque. Peur qui monte... «La fuite aux Agriates» est un roman bien mené.

Traversé par la force de la passion de Francesca pour Julius, il raconte aussi un monde où la violence des sentiments semble faire écho à la violence politique. Se lit d'une traite, comme brûlent les passions tragiques.

Marie Ferranti, «La fuite aux Agriates», Gallimard, 151pp.