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Ducumentu
Le Piège d'Aléria

A 10 h 30 environ, tandis que l'animation grandit autour de la cave, le journaliste Aimé Pietri arrive, bientôt suivi de Gérard Koch, photographe du Provençal corse, auquel Edmond Simeoni demande de le photographier devant la dizaine de fusils de chasse groupés sur la table du bureau. Il le prie ensuite de transmettre à son journal le désir de voir publier cette photo, le lendemain, en première page du quotidien. Edmond Simeoni n'ignore pas que cette publicité risque de le desservir auprès d'une fraction de l'opinion. Il accepte ce danger parce qu'il entend montrer qu'il assume toutes les responsabilités de l'action engagée à visage découvert, mais surtout parce qu'il pense que la présence des fusils préviendra un impensable assaut des forces de l'ordre — et induira la négociation souhaitable et espérée.

Devant le micro que lui tend Aimé Pietri, il fait une déclaration capitale, qu'il aura l'occasion, dans les heures qui suivent, de répéter devant beaucoup d'autres micros de la presse nationale et internationale :

Notre action d'aujourd'hui n'est pas dirigée dans le sens d'une modification des institutions. Ce n'est pas la revendication d'un statut d'autonomie interne. Ce n'est pas une manifestation de racisme ou de xénophobie. Ce n'est pas une chasse aux sorcières. Nous demandons simplement justice sur un point particulier. Il n'y aura pas de provocation de notre part. Il ne peut pas y en avoir. Les ordres sont rigoureux et strictement suivis. S'il devait y

avoir provocation, elle ne pourrait venir que de la police ou des services parallèles.

Nous demandons :

  • La libération, avec un non-lieu, de Dominique Capretti. Nous ne comprenons pas qu'on le garde en prison alors que les escrocs sont en liberté.
  • L'arrestation des escrocs.
  • La saisie conservatoire de leurs biens.
  • La redistribution sous forme communautaire des  2000 hectares et des caves des escrocs aux agriculteurs locaux les plus défavorisés.

Nous avons pris contact avec diverses organisations syndicales et socio-professionnelles. Demain vendredi 22, à 15 h 30, une grande réunion de concertation est prévue avec elles pour dégager une analyse et si possible une ligne d'action communes pour constituer un front commun de lutte.

Samedi 23, à 10 heures, nous donnerons une conférence de presse pour nous expliquer complètement. Et dimanche 24, à 16 heures, nous tiendrons ici même un grand meeting populaire qui rassemblera nos militants et sympathisants, et tous ceux qui en ont ras le bol de cette situation.

 Telle est la déclaration connue de toute la France, dès le jeudi par la voix des ondes, et le vendredi matin par la presse écrite. Elle est en particulier publiée in extenso par le Provençal corse du 22 août…

 

Pages 118-119-120

Photo de couverture Jean Catani

Editions Jean-Claude LATTÉS, 23, avenue Villemain, Paris-14°

© 1975, Ed. J: C. Lattes