Versione :

-

 

 

 

►L'intertextualité 

L'intertextualité nous permet de découvrir une oeuvre littéraire dans tout son foisonnement culturel. Grâce à l'étude de ce concept, on comprendra qu'une oeuvre n'est jamais autonome. Elle est en effet influencée par des oeuvres antérieures. Tout texte est à mettre en relation avec d'autres textes ou avec la culture

environnante dans lesquels, consciemment ou inconsciemment, l'auteur va chercher une partie de son inspiration.

 

Le constat

 

Un texte n'existe jamais tout seul.

 

D'une part, il fait le plus souvent partie d'un livre (recueil, discours, roman, pièce de théâtre, etc.), c'est-à-dire d'un ensemble d'autres textes qui entrent en résonance avec lui, et contribuent à lui donner son sens : par exemple, un poème de Victor Hugo, d'abord écrit pour lui-même, puis placé selon un certain ordre dans Les Contemptations, prendra de ce fait même une signification qui n'apparaissait pas dans le texte pris isolément.

 

D'autre part, un texte est souvent pétri de références culturelles plus ou moins conscientes (citations, imitations ou transpositions, pastiches, parodies, allusions, réminiscences) qui sont autant de traces plus ou moins littérales issues d'autres livres ou d'autres époques. Ainsi, les écrivains dits classiques imitaient d'une façon délibérée les << Anciens >>, c'est-à-dire les auteurs de l’Antiquité grecque et latine : ils leur empruntaient la matière de leurs oeuvres, des thèmes poétiques ou dramatiques, des fables, des mythes, des réflexions, etc., jusqu'à reprendre leurs formules mêmes (ainsi, la fameuse réplique de phèdre, << C'est toi qui l'as nommé >>, au vers 264, est déjà chez Euripide).

 

L'étude savante des << sources >> d'une oeuvre montre à quel point la part d'éléments empruntés est la règle et la part de création originale. Mais ce que les classiques faisaient délibérément, la plupart des écrivains le font spontanément, influencés qu'ils sont par leurs lectures, par le contexte culture auquel ils appartiennent, par les codes littéraires venus de leurs prédécesseurs, etc.

 

Bien entendu, dans cette place prise, au sein d'un texte donné, par les éléments textuels ou thématiques (formulations, motifs, mythes,

symboles, archétypes, etc.) venus d'ailleurs, les grandes traditions culturelles de notre civilisation se taillent la part du lion : l'héritage gréco-romain et l'héritage judéo-chrétien en particulier. Par exemple, on ne peut comprendre le titre du récit de Camus La Chute, sans se référer à la Genèse, pas plus d'ailleurs qu'une simple phrase comme celle de Proust :

<< Les vrais paradis sont ceux qu'on a perdus. >>

D'où une première définition : au sens strict, l'intertextuatité recouvre l'ensemble des traces laissées dans un texte donné par un ou plusieurs textes antérieurs (parfois contemporains), et l'étude des relations qu'on peut observer entre ce texte et ceux auxquels il fait écho (citation, imitation consciente, réminiscence ; reprise plus moins transformée ; référence critique ; opposition radicale, etc.). Car il ne suffit pas de découvrir ce que reprend un auteur : l'intérêt, c'est de montrer ce qu'il fait des éléments qu'il reprend.

 

La complexité de Ia notion

 

si l'on considère un texte à ces trois niveaux que représentent son

écriture, sa structure et sa thématique, on peut trouver à la notion

d'intertextualité une extension quasi sans limites :

 

. Du côté du style et de l'écriture, les tournures (souvent académiques), les expressions choisies (parmi toutes celles dont la

littérature a enrichi la langue), les références littérales ou proverbiales sont extrêmement nombreuses. C'est à celles-ci, le plus souvent explicites, que l'on pense d'abord lorsqu'on parle d'intertextualité. Mais les mots eux-mêmes dont use innocemment le moindre écrivain

 

 

 

3La traduction constitue un cas unique d'intertextualité.  En fait elle met en jeu trois ensembles de relations intertextuelles :

1-les relations entre le texte étranger et les autres textes, que ce soit dans la-la langue étrangère ou dans une autre langue ;

2-les relations entre le texte étranger et la traduction, traditionnellement envisagées jusqu’à présent en termes d’équivalence;

3- les relations entre la traduction et d’autres textes,

que ce soit dans la langue de traduction ou dans une autre langue.

Du point de vue du traducteur, ces trois ensembles de relations ne se

distinguent pas de façon aussi marquée : ils sont plutôt reliés les uns aux autres de manières diverses et complexes qui reflètent les gains et pertes variés que le texte étranger subit, tant sur le plan graphique et phonique que lexical et syntaxique, stylistique et discursif. Afin de recréer une forme d’intertextualité présente dans le texte étranger et partant, préserver une équivalence de cette forme, le traducteur s'efforce d'établir une relation Intertextuelle au sein de la traduction. Mais en remplaçant une relation à une tradition étrangère par une relation à la culture de la langue de traduction, le traducteur court le risque d'accroître l'écart entre le texte étranger et ses traductions. Le processus même de construction d'une intertextualité équivalente amène le traducteur à gommer les fondements de cette intertextualité et à lui substituer une différence linguistique et culturelle.