Pour deux
Teatru
Personnages:
Un Homme
Une Femme
Un Directeur
Un Serveur
Un Médecin.
Premier tableau.
La scénographie est inexistante, à peine quelques jeux d'ombres et de lumières pour mettre en valeur la présence sur scène de différents espaces. En revanche, les bruits provenant de la chaîne de montage sont assourdissants et couvrent des voix humaines rendues incompréhensibles.
Un Homme, minuscule "Charlot" des Temps Modernes, travaille frénétiquement devant une machine absente. Il en est ainsi durant un instant. Puis, une voix de stentor clame un nom incompréhensible. Pourtant le silence ne se fait pas et il semble évident que la voix veuille parler à Un Homme.
Voix d'Un Directeur: Eh, toi, là! Oui, toi! Viens par ici. Laisse tomber ton travail! D'ailleurs, tu ne dois plus travailler.
Un Homme se dirige en titubant vers la zone la pus sombre de la scène. Finalement, quand il s'en approche, un halo de lumière éclaire une chaise.
Voix d'Un Directeur: ça fait longtemps que tu travailles avec nous?
Un Homme: Presque un an.
Voix d'Un Directeur: Et tu en es satisfait?
Un Homme: Beaucoup.
Voix d'Un Directeur: Assieds-toi!
Un Homme ne s'assied pas, car il a entendu des bruits de pas et qu'entre alors Un Directeur qui, lui, s'empare énergiquement de l'unique chaise.
Un Directeur: Pourquoi ne t'assieds-tu pas?
Un Homme: Non, merci.
Un Directeur: Tu veux fumer?
Un Homme: Non, merci.
Un Directeur: Mets-toi à ton aise!
Un Homme: Oui, merci.
Un Directeur: Alors comme ça, tu es avec nous depuis un an.
Un Homme: Onze mois et deux semaines.
Un Directeur: Bien, ça me fait plaisir. Et il te plaît, ce travail?
Un Homme: Oui, beaucoup.
Un Directeur: Tu ne le trouves pas un peu répétitif?
Un Homme: Non, au contraire.
Un Directeur: Moi, je dis que quelqu'un comme toi, jeune, qui a fait des études, devrait aspirer à mieux dans la vie.
Un Homme: A moi, il me plaît ce travail. Il me plaît vraiment.
Un Directeur: Si toi tu es content... Combien tu gagnes?
Un Homme: Tout dépend des heures supplémentaires que je fais.
Un Directeur: Disons cinq mille ou cinq mille cinq cent?
Un Homme: Oui, six mille, le mois dernier.
Un Directeur: c'est comme je le disais, c'est trop.
Un Homme: Mais c'est vous qui m'avez demandé de faire des heures supplémentaires.
Un Directeur: Je sais, je sais. C'est moi.
Un Homme: Et vous même avez reconnu que je ne restais pas les bras ballants et que je rends au centuple ce que je gagne.
Un Directeur: Je sais, je sais bien ce que je dis!
Un Homme: Pardon
Un Directeur: Combien d'enfants as-tu?
Un Homme: Aucun.
Un Directeur: Tu es marié?
Un Homme: Oui.
Un Directeur: Et ta femme que fait-elle?
Un Homme: Elle étudie l'architecture.
Un Directeur: Tu vois bien, avec un architecte à la maison, quel problème pourrais-tu avoir? Je suis content. Vraiment content. (Il prend un cigare dans sa poche et l'allume) Tu en veux un?
Un Homme: Je ne fume pas.
Un Directeur: Et prends-le, vas, on ne sait jamais, dans la vie.(Il lui offre un cigare) C'est bien. Si tu ne veux pas le fumer maintenant, tu peux toujours le fumer après.
Un Homme: Merci.
Un Directeur: Moi aussi, j'aurais bien aimé faire des études, tu sais. Et pourtant non, je me suis marié jeune, et puis j'ai eu des enfants. Figure- toi que ma femme a à peine le certificat d'études. Moi aussi, tu me diras, mais pour un homme c'est pas pareil. Un homme, à l'extérieur, apprend le métier, il se forme sur le tas. Une Femme, en revanche, en restant toujours à la maison, si elle n'a pas étudié à l'école, où pourrait-elle apprendre quoique ce soit? C'est ce que je crois. Mes fils, au contraire, vont tous à l'université. Tous. Et j'en ai trois, trois universitaires.
Un Homme: C'est important, l'université.
Un Directeur: Alors comme ça, tu as épousé un architecte, ou une architecte? Moi, je te l'ai dit, je n'ai pratiquement pas fait d'études, et je ne comprends rien à la littérature.
Un Homme: Moi non plus.
Un Directeur: Bon, bon. Et combien elle gagne, ta chère et tendre? Un paquet de sous, j'imagine.
Un Homme: Non, elle ne gagne rien, et pour le moment il n'y a que des frais. Elle en est à peine à sa troisième année et elle a encore des examens de première année.
Un Directeur: Enfin, elle est bien architecte, et tôt ou tard, tu verras que vous aurez de l'argent, et alors... (Il fait une grimace de douleur)
Un Homme: Alors quoi?
Un Directeur: Pardon, ne fais pas attention. C'est l'âge. ça me prends sans prévenir, là, au côté gauche, comme une crise. Le médecin m'a donné des pilules, mais lui non plus ne sait pas ce que j'ai vraiment. Désormais, je ne fais plus attention, ça doit être l'âge, j'imagine. De quoi parlions-nous?
Un Homme: Je ne sais pas, peut-être de ma femme qui fait des études pour être architecte.
Un Directeur: Dis-moi, elle est belle ta femme?
Un Homme: Oui.
Un Directeur: Et elle t'est chère?
Un Homme: Oui!
Un Directeur: Tu as toutes les chances: jeune, instruit, une femme que tu aimes, mais alors...
Un Homme: Alors quoi?
Un Directeur: Alors je ne comprends pas pourquoi tu t'obstines à faire le simple ouvrier. Tu as fait des études, tu as de l'instruction, bientôt tu auras une femme architecte. Mais est-ce- que tu peux imaginer la situation? Madame l'architecte, Mes hommages, et elle, Bonjour, Monsieur l'ingénieur, je vous présente mon mari. Et l'autre, l'ingénieur, Oh, je suis ravi, et l'autre encore, Quel métier faites-vous? Avocat, médecin, ou tout au moins professeur, et toi, Non, ouvrier à la chaîne. Je ne peux pas y croire, non, je ne peux pas y croire.
Un Homme: Mais pourquoi, non? Moi, j'aime le métier que je fais. Il me rend vivant, j'aime le contact avec les machines, avec les objets.
Un Directeur: Toi, tu me fais marcher.
Un Homme: C'est faux.
Un Directeur: Depuis combien de temps tu es ici avec nous?
Un Homme: Presque un an.
Un Directeur: Tu as des enfants?
Un Homme: Non, je n'ai pas encore d'enfants.
Un Directeur: Et tu en voudras, n'est-ce pas?
Un Homme: Bien sûr que j'en voudrai.
Un Directeur: Bravo, et n'attends pas d'avoir quarante ans pour mettre au monde le premier, suis mon conseil. Commence tout de suite, maintenant que tu es jeune.
Un Homme: Evidemment.
Un Directeur: Moi, j'en ai trois, et j'ai même déjà trois petits neveux. Mais peut-être que ta femme n'en veux pas, les architectes, on le sait, c'est des femmes, un peu comme ça, je crois.
Un Homme: Je ne comprends pas.
Un Directeur: Quelle heure il est?
Un Homme: Onze heures.
Un Directeur: Bon, passe au bureau, et fais -toi régler tes indemnités.
Un Homme: Je ne comprends pas.
Un Directeur: Passe au bureau, et fais -toi régler tes indemnités. Nous te payons comme si tu avais travailler tout le mois. Presque dix jours en plus.
Un Homme: Mais pourquoi?
Un Directeur: Tu es licencié, tu ne l'avais pas compris?
Un Homme: Non, non, ce n'est pas vrai! C'est une plaisanterie, dites-moi que c'est une plaisanterie.
Un Directeur: C'est pas la peine de crier, tu es licencié, il fallait bien qu'il y en ait un, et toi, d'abord, tu es là depuis peu de temps, tu n'as pas de famille, et puis tu serais parti faire le professeur dieu sait où, donc, moi je dis que c'est mieux que ce soit toi plutôt qu'un père de famille.
Un Homme: Vous ne pouvez pas me faire ça.
Un Directeur: Mais bien sûr qu'on peut.
Un Homme: J'ai besoin de travailler.
Un Directeur: Nous en avons tous besoin, mais là n'est pas la question.
Un Homme: Et quelle est la question?
Un Directeur: Qu'il fallait bien que ce soit quelqu 'un.
Un Homme: Et ce quelqu'un, c'est moi.
Un Directeur: Oui, c'est toi.
Un Homme: Parce que je suis jeune, que je n'ai pas d'enfants, et que je suis instruit.
Un Directeur: Exact. Je suis content que tu aies compris. Et ne t'inquiète pas, intelligent comme tu es, tu verras, tu vas trouver très vite un autre emploi.
Un Homme: Merci.
Un Directeur se lève et disparaît dans la zone sombre, le vacarme initial comble le silence, Un Homme lance un cri de douleur, et c'est de nouveau le silence. Un Homme apparaît, puis disparaît, endossant une veste, il s'assoit sur la chaise, la tête entre les mains. Après quelques instants Un Serveur s'approche de lui pour prendre la commande. A cet instant, on entend un fond sonore, Pat Metheny, Antonia.
Un Serveur: S'il vous plaît!
Un Homme ne lui répond pas, il pleure, le serveur s'en aperçoit et repart.
Un Serveur: Excusez-moi, je m'étais pas rendu compte.
Un Homme: Merci, au contraire, attendez.
Un Serveur revient.
Un Serveur: Vous dites?
Un Homme: Portez- moi quelque chose de fort.
Un Serveur: Brandy, whisky, cognac?
Un Homme: Oui.
Un Serveur: Excusez-moi, brandy, whisky, ou cognac, qu'est-ce que vous préférez?
Un Homme: Je ne sais pas, excusz-moi, choisissez.
Un Serveur s'éloigne.
Un Homme: Ecoutez, excusez-moi.
Un Serveur s'approche.
Un Serveur: Dites-moi.
Un Homme: Amène -moi une bière.
Un Serveur: ça va.
Un Homme: Grande.
Un Serveur: Tout de suite, Monsieur.
Un Homme: Tu ne me demandes pas pourquoi je pleure?
Un Serveur: Je ne me le permettrai jamais.
Un Homme: J'ai été licencié.
Un Serveur: Ça me déplaît.
Un Homme: Ce matin.
Un Serveur: Ça me déplaît.
Un Homme: À onze heures précises, le chef m'appelle.
Un Serveur: Ah!
Un Homme: Toi, viens au bureau. Qui sait, ai- je pensé, peut-être un changement de poste, davantage de responsabilité, une augmentation de salaire. Vous vous rendez compte, je croyais qu'il m'avait fait appelé pour une augmentation, alors qu'il m'avait appelé pour me licencier.
Un Serveur: Cela me déplaît vraiment.
Un Homme: Ne t'inquiète pas, j'ai de l'argent pour payer la bière, et même pour le pourboire, si c'est pour ça (il fouille dans ses poches et en extrait une bourse)
Un Serveur: On m'appelle par là (il fait comme pour s'éloigner)
Un Homme: Ne partez pas, regardez ici. (il lui montre un papier) Lisez.
Un Serveur: Excusez-moi, je ne voudrais pas être déplaisant, mais l'affaire ne me regarde pas.
Un Homme: Il est écrit que je viens d'être mis à pieds, qu'ils me mettent dehors.
Un Serveur: ça me déplaît. Quelle bière je vous amène?
Un Homme: Celle que tu veux, il suffit qu'elle soit grande.
Un Serveur disparaît dans la zone d'ombre.
Un Homme: Tout petit, j'avais de grands projets. Je voulais devenir plombier. Construire des digues, arrêter le mer et les fleuves. Alors, tu veux faire des études d'ingénieur? me disait-on, et moi, Non, je veux être plombier, pour faire courir l'eau dans les tuyaux et la conduire partout. Qu'il est mignon, disaient les amis de ma mère, mais sans doute voulaient-elles dire: qu'il est fou! Et puis j'ai grandi, et à l'école ça n'allait pas trop mal et comme ça, j'ai fait des études, comme tout le monde, jusqu'à l'université, études de Droit, ou sciences po., j'ai déjà oublié. Mais je n'étais pas heureux, je voulais être plombier, pour arriver à canaliser la mer dans les tuyaux. Et un beau matin, je l'ai rencontrée, je ne l'avais plus vue depuis le collège, j'avais quitté une enfant aux cheveux tressés, et maintenant c'était une femme.
Un Serveur entre avec un plateau sur lequel il y a une bouteille et un verre.
Un Serveur: S'il vous plaît.
Un Homme (Les mains occupées par le verre et la bouteille): Attendez, je veux régler tout de suite. Ne partez pas, attendez (Et impatient, finalement il met la bouteille sous le bras, le verre dans la même main, et il réussit à prendre l'argent) Garde le reste. (La bouteille lui échappe) Merde!
Un Serveur: Peu importe, je vous en amène une autre aussitôt.
Un Homme: ça ne fait rien, elle ne s'est pas complètement renversée, il y en a encore, regarde (il remplit le verre de mousse et boit)
Un Serveur apparaît et entre avec une autre bouteille et un chiffon, il donne la bouteille à Un Homme et puis il s'accroupit pour essuyer le sol.
Un Serveur: S'il vous plaît.
Un Homme: Je voulais être plombier, depuis tout petit, mais même maintenant ça me plairait, figurez-vous.
Un Serveur: Je comprends.
Un Homme: J'ai même étudié le Droit, je ne me souviens plus si c'était pour être avocat ou juge, mais la vérité c'est que ça m'était bien égal, j'obtenais mes examens parce qu'on m'avait dit qu'il fallait que je fasse quelque chose, mais je n'étais pas heureux. Je voulais être plombier. Ensuite, je l'ai rencontrée, elle, ma femme. Toi, tu n'es pas heureux, m'a-t-elle dit, je le lis dans tes yeux. Je n'ai eu besoin que de cette seule phrase pour la reconnaître, pour comprendre que c'était elle, la femme de ma vie.
Un Serveur (se relevant) : Voilà, tout est réglé.
Un Homme: Toi, tu es heureux?
Un Serveur ne répond pas et s'éloigne.
Un Homme: Moi, au contraire, je ne sais plus si je suis heureux, je l'étais jusqu'à ce matin, onze heures, jusqu'à ce qu'ils me licencient. J'étais heureux parce que j'aime mon travail, ça me plaît d'assembler des tuyaux, de serrer des boulons, des vis, de me salir les mains de graisse, de souder des métaux entre eux. C'est ma femme qui m'a remis sur le chemin, j'aurais pu devenir avocat, ou juge, correct sans doute, voire honnête, mais j'aurais été un juge ou un avocat malheureux, parce que moi, je suis un plombier, et même un spécialiste des tuyaux. Mais personne ne pouvait me comprendre parmi les miens, parmi mes amis. Tu parles d'un tuyau, ton histoire de plombier! me disaient-ils, tu raisonnes ainsi parce que tu perds les boulons, et puis ils éclataient de rire, contents de leurs petits jeux de mots. Et puis, elle est arrivée, elle.
De l'autre côté de la scène, un halo de lumière éclaire Une Femme, elle a dans les mains une brosse à cheveux qu'elle utilisera à chaque prise de parole.
Un Homme et Une Femme: Tu ne dois pas faire ce qui ne te convient pas seulement pour une histoire d'apparence. Toi, tu veux être heureux, moi, je veux être heureuse. Pour être heureuse, j'ai besoin de toi, et d'un travail qui me plaît, pas n'importe lequel, un qui me plaise vraiment, un travail que je puisse aimer autant que je t'aime.
Un Homme: Et moi, j'ai besoin de toi pour vivre, parce que je t'aime, parce que tu me comprends.
Un Homme et Une Femme: Et d'un travail aussi. Qu'est-ce que tu voulais faire petit?
Un Homme: Le "spécialiste des tuyaux".
Une Femme disparaît et entre Un Serveur, il amène une autre bouteille.
Un Serveur: Voilà pour vous.
Un Homme: Ne partez pas, attendez.
Un Serveur: Dites moi.
Un Homme: ça vous plaît de voyager? Avec ma femme on fait toujours de beaux voyages. Nous sommes allés en Turquie cet été. Et l'été prochain, nous irons en Amérique du Sud, en Honduras. Et lire, ça vous plaît de lire? Ma femme et moi, nous lisons beaucoup, des heures entières. Chacun dans un coin du divan, moi d'un côté et elle de l'autre, nous passons des heures ainsi, à lire, sans parler. Et faire l'amour? ça vous plaît de faire l'amour?
Un Serveur prend la bouteille et tente de s'éloigner.
Un Homme: Attendez, je veux vous faire un cadeau.
Un Serveur: ça me déplaît, je ne peux pas accepter.
Un Homme sort le cigare de sa poche et le met dans celle d'Un Serveur.
Un Homme: Prenez- le, s'il vous plaît, jettez- le ou offrez- le mais seulement quand je serai parti. Je vous en prie.
Un Serveur: Merci. (Il disparaît)
Un Homme (après avoir bu) : Je rentrerai à la maison à l'heure habituelle et je ferai comme si de rien n'était. Je ne lui dirai pas qu'ils m'ont licencié. Je suis un acteur courageux, moi. Tout petit, à l'école, j'avais toujours le rôle du personage principal dans le spectacle de Noël. Oui, je ne lui dirai rien, je ferai semblant durant tout le temps qu'il faudra pour trouver un autre emploi. Quelque il soit. Parce que j'aime ma femme et je ne veux pas qu'elle souffre. Vous me direz qu'elle aussi cessera de faire des études, qu'elle se fera embaucher à un poste quelconque. Et moi je ne veux pas , je l'aime trop. (À Un Serveur) Dites-moi que je fais bien de cacher la vérité. Dites-moi, vous aussi, vous feriez comme moi, n'est-ce-pas? Elle ne s'apercevra de rien. Chaque matin je me lèverai à la même heure et je lui dirai que je vais travailler. Alors que au lieu de me rendre à mon travail, j'irai plutôt en chercher un nouveau, peu importe lequel.
Un Serveur, avec un plateau dans les mains sur lequel trônent une bouteille et un verre. Le halo de lumière s'allume et chantent alors en duo Une Femme, qui se brosse les cheveux, et l'Estudiant de Vic.
Un Serveur et Une Femme (chantent):
Una cançó vull cantar,
una cançó nova i linda,
d'un estudiant de Vic
que en festejava una viuda.
Bon amor, adéu-siau,
color de rosa florida.
Bon amor, adéu-siau.
Ella es volia casar,
el seu pare no ho volia,
i l'estudiant se'n va anar
a servir una rectoria.
Bon amor, adéu-siau,
color de rosa florida.
Bon amor, adéu-siau.
Però la viuda el va seguir
a Roma de pelegrina.
Quan es van tornar a trobar,
una basca ja en tenia.
Bon amor, adéu-siau,
color de rosa florida.
Bon amor, adéu-siau.
Nines que veniu al món,
no es fieu de gent de llibres,
tenint-ne quatre raons
a se'n van a cantar missa.
Bon amor, adéu-siau,
color de rosa florida.
Bon amor, adéu-siau.
La chanson est finie, Une Femme disparaît, Un Homme fredonne le refrain.
Un Homme (fredonnant):
Bon amor, adéu-siau,
color de rosa florida.
Bon amor, adéu-siau.
ça vous plaît les chansons populaires? À ma femme et moi, elles nous plaisent tant. Surtout celles d'origine médiévale. On a un paquet de disques à la maison. À chaque voyage que nous avons fait, nous avons toujours récupéré un disque ou deux. Dans les langues les plus variées. Breton, gaélique, sarde, catalan. (il fredonne)
Una cançò vull cantar
Una cançò nova i linda.
Vous ne comprends pas ce que je dis? Ce n'est pas difficile. C'est une histoire d'amour entre un étudiant et une veuve. Mais son père à elle ne veut pas et lui va travailler dans une administration romaine, elle le rejoint sans prévenir et elle le retrouve avec une autre femme.
Un Serveur (en prenant la bouteille): Je vous en apporte une autre?
Un Homme: Non, j'ai trop bu.
Un Serveur: Je vous amène la note?
Un Homme: Non, portez m'en une autre, c'est trop tôt pour rentrer à la maison.
Un Serveur: Comme vous voulez.
Un Homme: Je ne sais pas faire semblant, je n'ai jamais su faire semblant. Non, à peine me regardera t-elle dans les yeux, qu'elle comprendra tout. Que je n'ai plus d'emploi, que nous ne pourrons plus aller en vacances, que peut-être devrons-nous chercher une maison moins chère que celle que nous occupons maintenant, que peut-être faudra t-il vendre la voiture. Qu'il ne sera pas facile de surmonter les prochains mois
Nuit noire. Le halo de lumière se déplace vers le centre de la scène. Un Homme le suit traînant derrière lui la chaise, et la bouteille à la main. Il laisse la chaise sous la lumière, il s'éloigne et revient sans veste et en savates; il a un téléviseur portatif allumé qu'il met devant lui, per terre, il s'assoit, il boit. La télé fait du bruit et envoie de la lumière, Un Homme s'endort. Entre Une Femme, elle se tient derrière lui, entre les mains elle a une grande feuille blanche. Elle le regarde amoureuse. Elle éteint la tété, ramasse la bouteille, sort, revient avec un plaid qu'elle met sur les épaules de l'homme, pour le protéger du froid. Elle l'embrasse sur une joue. Lui se réveille, ils s'embrassent, la musique d'un tango de Piazzola, Tanguedia III, retentit.
Un Homme: Amour, c'est toi?
Une Femme: ça va?
Un Homme: Je suis heureux.
Ils pleurent dans les bras l'un de l'autre. Nuit noire, Tanguedia III continue jusqu'au début de la nouvelle scène.
Deuxième tableau.
La scénographie est inexistante, seulement quelques jeux d'ombre et de lumière pour mettre en valeur la présence sur scène de différents espaces. La sonnerie d'un réveil retentit de plus en plus stridente. Devenue assourdissante, après quelques minutes, elle s'interrompt brusquement. Un moment de silence, et apparaît Une Femme. Elle enfile une chemise de nuit, elle a les chzveux en bataille et elle est ensommeillée. Elle tient une tasse de café dans les mains et tourne la cuillère. Elle boit. Elle repose la tasse, elle se caresse le ventre. Elle pense à quelque chose qui la rend heureuse. Elle dépose la tasse à terre. Elle pose les deux mains sur son ventre. Elle se regarde pleine de joie. Elle reprend la tasse et disparaît. Elle fredonne l'Estudiant de Vic.
Voix d'Une Femme (Elle chante) :
Una cançon vull cantar,
...........................
Bon ammo, adéu, adéu-siau
Un téléphone sonne. Après quelques sonneries, réapparaît Une Femme, elle n'est qu'à moitié vêtue. La chemise n'est pas rentrée dans la jupe, elle a une chaussure dans la main et le téléphone calé dans le cou. Elle terminera de s'habiller pendant qu'elle parle au téléphone.
Une Femme: Oui?
Bonjour.
Je vais bien, oui, ça va, merci.
Maintenant, nous attendons.
Lui? Lui non, le pauvre. C'est un vrai trésor, cela fait plusieurs jours que je suis désagréable, et que j'ai la tête ailleurs. Mais lui, il ne me le reproche pas. Il nous suffit d'un regard pour nous comprendre.
Aujourd'hui encore, comme hier, et comme mardi, je n'ai pas réussi à me réveiller, mais lui ne m'a pas dérangé, il a préparé tout seul son petit-déjeuner et il est allé travailler sans me réveiller.
Avant de partir, il a laissé le café au chaud pour moi.
Oui, je te rappelle, au revoir.
A tout à l'heure.
Merci, au revoir.
Une Femme disparaît. Tel her you saw me, de Pat Metheny, remplit le silence. Un halo de lumière illumine une chaise. Un moment après apparaît Un Médecin, il a dans la main une grande feuille blanche. Encore quelques instants et apparaît Une Femme.
Un Médecin: Bonjour, comment allez-vous?
Une Femme: Bonjour (elle rit)
Un Médecin: Pourquoi riez-vous, vous êtes de bonne humeur, aujourd'hui?
Une Femme: Oui, non, je ne sais pas.
Un Médecin: Je comprends.
Une Femme: Excusez-moi, c'est que le "comment allez-vous?" demandé par Un Médecin me fait rire. En principe, au contraire, c'est le patient qui demande au médecin "Comment me trouvez-vous?" et le médecin répond "bien" ou "mal".
Un Médecin: Vous avez raison, je dois dire que vous avez raison. Dommage que ce ne soit pas toujours possible, encore que dans notre cas, je vous assure que vous allez vraiment bien. Compliments. (Il lui tend la feuille) Regardez, toutes vos analyses sont bonnes. Vous êtes éclatante de santé.
Une Femme (inquiète): Vraiment?
Un Médecin: Oui, vraiment. Mais vous ne semblez pas contente. Vous auriez peut-être préférez que je vous dise que vous alliez mal?
Une Femme: Non, ce n'est pas ça.
Un Médecin: Ce n'est pas ça?
Une Femme: Non, c'est que moi j'espérais...
Un Médecin: Vous espériez? (Il se lève et la fait asseoir sur la chaise) Qu'est-ce que vous espériez?
Une Femme: Oui, même si ce n'est pas le moment le mieux choisi... Je n'ai pas encore fini mes études, vous savez?
Un Médecin: Qu'est-ce que vous étudiez?
Une Femme: Architecture.
Un Médecin: Bien, et cela vous plaît?
Une Femme: Beaucoup, cela me plaît beaucoup.
Un Médecin: Et alors?
Une Femme: Voilà, bien qu'on ne puisse pas se le permettre, à cause de la maison, du loyer, de la voiture, des imprévus, l'idée d'avoir un enfant commençait à me plaire.
Un Médecin: Bien, le ciel vous a satisfaite.
Une Femme: Comment dites-vous?
Un Médecin: Que le ciel a exaucé vos voeux. Le ciel ou le destin, ou le hasard, ou celui qu'il vous plaira vous a mise enceinte, vous attendez un enfant.
Une Femme reste sans voix, elle regarde le médecin stupéfaite.
Un Médecin: Je vous fait portez un verre d'eau?
Une Femme (Elle crie): Ouiiiii!
Un Médecin: Un instant.
Une Femme: Non, ne partez pas. Je n'ai pas besoin d'eau mais de champagne, de chocolats, j'ai besoin que l'on me serre très fort dans ses bras.
Un Médecin: Je ne peux pas vous donnez les deux premières choses que vous demandez mais pour la troisième, me voilà.
Une Femme et Un Médecin s'embrassent. Obscurité. La lumière d'un projecteur crée un écran qui aveugle Un Homme. Instinctivement, il met un bras sur ses yeux pour se protéger. Un faible halo de lumière éclaire Une Femme qui parle au téléphone, elle rit. Sur Un Homme viennent se projeter des images extaites de Ciao Rudy, Mastroianni qui danse déguisé en Valentino. Une Femme chante Vuelvo al sur, de Piazzola/Solanas. Quand Un Homme entend Une Femme chanter, Un Homme se détend et cherche à imiter les pas et les attitudes de Mastroianni.
Une Femme (elle chante) :
Vuelvo al Sur,
.................
Te quiero Sur.
Un Homme disparaît. Une Femme est éclairée par un halo de lumière qui la suit dans ses mouvements qui deviennent un enchaînement de pas de danse. Elle continue à parler au téléphone et on perçoit quelques bribes de phrases.
Une Femme: Je ne suis pas folle. Je marche en dansant mais je ne suis pas folle, je te le jure!
Non, non je ne veux pas que tu viennes, j'irai tout de suite à la maison, je veux que ce soit lui qui l'apprenne le premier.
Il sera encore plus heureux que moi lorsqu'il saura ce qui m'arrive. Ce qui nous arrive.
Cela changera quelque chose entre nous? Bien sûr, mais en mieux, nous ne serons plus un couple mais une famille.
Une famille, une famille, une famille.
La lumière se déplace et se pose sur la chaise. Une Femme se dirige vers la chaise, elle ôte son manteau, s'arrange, et flirte avec la feuille blanche. La scène est inondée de notes de musique, d' Antonia di Metheny. Une Femme porte ses mains au visage et se met à pleurer. Après quelques instants, apparaît Un Serveur.
Un Serveur: Vous désirez?
Une Femme ne lui répond pas, elle pleure, le serveur ne s'en aperçoit pas et s'en va.
Un Serveur: Excusez-moi, je ne m'en étais pas aperçu.
Une Femme (gaiement) : Attends, ne t'en va pas.
Un Serveur revient .
Un Serveur: Vous dites?
Une Femme: Vous m'amenez quelque chose.
Un Serveur: Avec ou sans alcool?
Une Femme: Oui.
Un Serveur: Excusez-moi, avec ou sans alcool, que préférez-vous?
Une Femme: Je ne sais pas, faites, faites.
Un Serveur s'éloigne.
Une Femme: Ecoutez, s'il vous plaît!
Un Serveur s'approche.
Un Serveur: Dites-moi.
Une Femme: Vous m'amenez du mousseux, non, plutôt du champagne.
Un Serveur: De quelle marque?
Une Femme: Je m'en remets à vous.
Un Serveur: Je reviens tout de suite.
Une Femme: Vous ne me demandez pas pourquoi je pleure?
Un Serveur: Non, je ne me le permettrai jamais.
Une Femme: Parce que je suis heureuse.
Un Serveur: Je suis content.
Une Femme: Ce matin, il y a peu de temps, je suis allée chez le médecin, chez le gynécologue...
Un Serveur: Ah!
Une Femme: Et il m'a dit que je n'avais rien, que j'étais bien portante.
Un Serveur: Bien.
Une Femme: J'attends un enfant (Elle lui montre la feuille blanche) : Regardez, lisez.
Un Serveur: Je m'excuse, je ne voudrais pas être maladroit, mais ça ne me regarde pas.
Une Femme: Je vous en prie.
Un Serveur (Il prend la feuille) : Je suis content pour vous. Vraiment content. (Il s'éloigne)
Une Femme: Amenez aussi un verre pour vous, nous devons trinquer.
Un Serveur disparaît dans la zone d'ombre.
Une Femme: Qu'est- ce que tu veux faire plus tard, petite? Moi, je répondais architecte. Quel beau métier! Mais il n'est pas un peu trop masculin? Mais moi je suis Un Homme, je répondais. Mais j'étais menteuse. Plus tard, je voulais seulement être mère. La mère d'un enfant à rendre heureux.
Un Serveur entre avec un plateau sur lequel il y a une bouteille et deux coupes. Il verse avec délicatesse le champagne dans les verres puis ils trinquent.
Un Serveur: Félicitations.
Une Femme: Merci!
Un Serveur: D'habitude je ne le fais pas, mais là c'est une occasion particulière.
Une Femme: Merci!
Un Serveur: Ce n'est pas courant de fêter un événement aussi heureux, enfin il vaudrait mieux dire "une bonne nouvelle"?
Une Femme (Elle rit) : Bonne nouvelle, même si ce n'est pas tout à fait le cas.
Un Serveur: Et si vous me permettez, je voudrais vous offrir, sans doute un peu en avance, en échange de votre invitation un beau cigare pour le papa!
Un Serveur tend le cigare et Une Femme le prend.
Une Femme: Merci!
Un Serveur: Et encore meilleurs voeux.
Une Femme: Merci!
Une Femme: Cela fait longtemps que vous faites le serveur.
Un Serveur: Oui, plusieurs années.
Une Femme: Et cela vous plaît.
Un Serveur: Peut-être.
Une Femme: Peut-être, ce n'est pas une réponse.
Un Serveur: Alors, ça me plaît.
Une Femme: Vous ne voulez pas savoir pourquoi je vous le demande?
Un Serveur: Pourquoi me le demandez-vous?
Une Femme: Parce que je suis curieuse. Je suis curieuse comme une fouine, curieuse comme une femme, comme une femme normale, comme n'importe quelle femme.
Un Serveur: ça vous plaît tant que ça d'être une femme quelconque.
Une Femme: Oui, ça m'enchante.
Un Serveur: Je ne comprends pas.
Une Femme: Moi non plus je ne comprenais pas, jusqu'à ce matin. J'ai vécu tant d'années cherchant à être différente, à me distinguer de la masse, à être tellement moi même que j'en avais perdu le sens des choses. En fait, cherchant à être différente, j'étais exactement comme le voulaient mes parents, mes professeurs, mes amis. Alors que finalement maintenant je me sens vraiment moi même, une femme quelconque, une femme amoureuse et surtout une femme enceinte.
Un Serveur: Vous, vous êtes très sympathique, vous savez.
Une Femme: Merci, vous aussi, vous êtes sympathique.
Un Serveur: Ce n'est pas vrai. Avec le métier que je fais, on ne peut pas être sympathique. Savez-vous quelle espèce de gens on rencontre?
Une Femme: Vraiment?
Un Serveur: Et je ne vous parle pas des sales gueules et des poivrots.
Une Femme: Non?
Un Serveur: Non, je parle des gens qui voudraient que nous, les serveurs, nous fassions les curés ou les psychanalystes, comme si la confession ou la psychothérapie étaient comprises dans le prix du café.
Une Femme: Non? (Elle verse encore du champagne pour lui et pour elle)
Un Serveur: Excusez-moi, qui sait ce que vous allez penser de moi, moi qui me plaint de ceux qui voudraient se défouler avec moi et qui me comporte exactement comme ceux dont je dis du mal. Excusez-moi.
Une Femme: Mais non, j'aime écouter les autres, je l'ai dit, je suis très curieuse, et puis maintenant que je vais être mère, je dois même m'habituer à écouter, vous ne croyez pas?
Un Serveur: Il a de la chance votre mari d'avoir une femme comme vous.
Une Femme: Vous croyez?
Un Serveur: J'en suis sûr.
Une Femme: Moi, au contraire, je ne le sais plus.
Un Serveur: Ne parlez pas ainsi.
Une Femme: Maintenant qu'il y a l'enfant, je devrai l'obliger à comprendre qu'il ne peut plus faire seulement ce qu'il lui plaît, mais qu'il devra assumer d'autres responsabilités. Ainsi, pour ce qui est de son travail, il ne peut plus le considérer seulement comme un jeu de grands, mais comme une responsabilité face à sa famille. Il faudra qu'il prenne en considération la valeur de l'argent.
Un Serveur: Les enfants, ça coûte cher.
Une Femme: Et oui.
Un Serveur: Excusez-moi.
Un Serveur regarde vers un coin de la scène comme si on l'appelait et s'éloigne. Un halo de lumière eclaire Un Homme, il a les mains dans les poches et le col de la veste relevé, il a froid.
Une Femme et Un Homme: Nous ne pouvons pas seulement parler de notre bonheur. Toi, tu veux être heureux et moi je veux être heureuse. Mais il y a les autres, qui ne sont pas seulement à l'extérieur de nous mais aussi à l'intérieur de nous. Nous avons besoin des autres pour vivre. Nous avons besoin d'aimer. De nous aimer.
Une Femme: Et moi j'ai besoin de toi, pour vivre, parce que je t'aime, parce que tu me comprends.
Une Femme et Un Homme: Quel métier voulais-tu faire, enfant?
Une Femme: la maman!
Un Homme disparaît et entre Un Serveur, il porte un plateau avec des petits gâteaux de coktail.
Un Serveur: Ils sont compris dans le prix du champagne, je les avais oubliés.
Une Femme: Vraiment?
Un Serveur: Mais bien sûr!
Une Femme: Je vous remercie. Ecoutez!
Un Serveur: Dites-moi.
Une Femme: Si j'étais votre femme et si j'attendais un enfant, comment réagiriez-vous?
Un Serveur: Je ne sais pas.
Une Femme: Vous n'avez pas d'enfant?
Un Serveur: Oui, Deux.
Une Femme: Et alors?
Un Serveur: Je suis divorcé depuis cinq ans.
Une Femme: Je suis désolée.
Un Serveur: Toutes les trois semaines, Je vois mes enfants le week-end.
Une Femme: C'est vrai, je ne voulais pas.
Un Serveur: Ne vous inquiétez pas, tout est fini maintenant; C'était ma faute, et aussi à cause de ce métier impossible. Je rentrais très tard le soir et toujours très excédé, comme si ma femme était l'unique coupable de l'irritation de la journée.
Une Femme: Et votre femme, elle ne le comprenait pas?
Un Serveur s'éloigne, Une Femme mange nerveusement les petits gâteaux.
Une Femme: Je ferai en sorte de me trouver à la maison et je ferai semblant de rien. Je ne lui dirai pas pour le bébé. Il me croira, il croit toujours ce que je lui dis. Oui, je ne lui dirai rien tant que je ne serai pas certaine qu'il peut être papa, je ne lui en parlerai pas avant. Je l'aime trop pour l'obliger à franchir un pas pour lequel il n'est pas préparé.
Un halo de lumière éclaire Un Serveur, qui balaie avec peu d'entrain, commence à chanter, "distraitement", Vuelvo al Sur. Une Femme se lève et va vers lui toujours plus joyeuse.
Elle lui enlève des mains le balai, elle le laisse tomber et ils dansent et ils chantent.
Pendant ce temps, Un Homme tourne autour de la chaise tenant à la main une bouteille. Puis, il la pose par terre, disparaît et revient sans veste et en savates, traînant derrière lui un téléviseur portatif allumé qu'il pose devant lui, par terre, il s'assoit, boit. La télé fait du bruit et envoie de la lumière, Un Homme s'endort.
Un Serveur a disparu. Une Femme, qui ne chante pas ni ne danse, entre, tenant dans les mains une feuille blanche. Amoureuse, elle regarde Un Homme. Elle éteint la télé, ramasse la bouteille, sort, revient avec un plaid qu'elle met sur lui. Elle l'embrasse sur une joue. Lui se réveille, ils s'embrassent, la musique d'un tango de Piazzola, Tanguedia III, se fait entendre.
Un Homme: Amour, c'est toi?
Une Femme: Comment vas-tu,
Un Homme: Je suis heureux.
Ils pleurent dans les bras l'un de l'autre. Obscurité, Tanguedia III.