DICHJARAZIONE UNIVERSALE DI I DIRITTI LINGUISTICHI

Scontri di 31.05.2019

LANGUES MINORÉES, VENT DE LIBERTÉ....

DICHJARAZIONE UNIVERSALE DI I DIRITTI LINGUISTICHI

Actes du colloque (5e FESTIVENTU)

CALVI 23 octobre 1996

(Actes,2e Partie)

 

 

A.BIGHELLI. - Je voudrais tout d'abord rne réjouir de la bonne nouvelle que j'apprends aujourd'hui, à savoir Ie processus d'adoption d'une charte de protection des langues rninorées. Je pense que c'est un grand bien pour la Corse car l'évolution des mentalités commence peut-être par cela, par mettre en avant les idées pour que cela se traduise dans les faits et dans la vie de chaque jour. Je voudrais sirnplenrent savoir commert cette solidarité entre la langue minorée et la langue dominante, qui transparaît au regard de cette charte, de cette déclaration, va se traduire dans les faits. En Corse, par exemple, cela commencera-t-il par l'adoption du bilinguisme -et un bilinguisme certainernent plus poussé qu'on ne le

connaît aujourd'hui ?

 

J.THIERS. - Concemant la Déclaration Universelle des Droits Linguistiques,  je peux vous donner lecture de la décision du Conseil Economique, Social et Culturel de la Corse dans sa réunion du ler

octobre 1996, il y a donc à peine un mois :

 

Considérant que le 6 juin 1996 à Brcelone, dans le cadre de la Conférence mondiale des droits linguistiques, la Déclaration Universelle des Droits Linguistiques a été adoptée ;

 

Considérant que cette déclaration proclame l'égalité des droits linguistiques sans distinction entre langues officielles, non officielles officiellcs, nationales, régionales, locales, majorilaires, minoritaires, modernes, archaïques ;

 

Considérant que la Déclaration Universelle des Droits Linguistiques

se base sur les principes contenus aussi bien dans un texte de caractère général comme la la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de 1948 que dans d'autres très spécifiques comme la  Charte européenne des langues régionales ou minoritaires de 1992 approuvée par délibération de l’Assemblée

 

Considérant  que la dite déclaration a été rédigée avec l'appui

technique et moral de l'Unesco et signée par 58 institutions, organisations non gouvernementales ainsi que par 27 centres du Pen Club,

 

Sur rapport de: la commission « Langue et Culture »,

 

Article Ier : adhère à la Déclaration Universelle des Droits Linguistiques aux fins de contrihuer à sa reconnaissance dans les inslances les plus représentatives des citoyens européens et de

Promouvoir ainsi sa diffusion dans tous les pays du monde

 

Article 2 : propose la création du Conseil des langues au sein des

Nations Unies. C’est à l'Assemb!ée des Nations Unies qu'incombent la création et la définition de ce Conseil ainsi que des personnes qui le composent et la création d’un organisme de droit international qui doit défendre les comunautés linguistiques à la lumière des droits reconnus dans cette déclaration

 

Article 3 : propose et promeut la créatlion d'une Commission mondiale des droits linguistiques de nature non officielle et de caractère consullatif formée par des représentants d’ONG et les entités du dornaine des droits linguistiques ;

Article 4 : souhaite que l’Assemblée de Corse délibère sur ce sujet."

 

A travers le caractère un peu solennel de ce texte, vous voyez que les rnentalités sont, ici comme ailleurs, prêtes à accueillir ce document pour ce qu'il est, c'est-à-dire la possibilité pour la langue

minorée actuellement en Corse, à travers la Déclaration universelle des droits linguistiques, de disposer d'un effort particulier dans le respect bien entendu des autres langues parlées en Corse et surtout dans le respect des individus, dans leur nécessaire accès à toutes les langues qui constituent le patrimoine de l'humanité tel qu'il peut être perçu à travers la Corse, avec le souci d'accentuer la protection dans un premier temps et dans un second temps la promotion de la langue minorée. Indépendamment de ces textes un peu généraux, cela veut dire aussi que toute collectivité peut se saisir de ce texte ct donner son avis. C'est aussi par là que les mentalités sont suseptibles d'évoluer au quotidien, là où se déroule

majoritairement la vie des gens dans les lieux, les espaces, les communes, dans leur proximité imnrédiate. Je crois que la multiplication des reflexions sur des documents conrme celui-là est de nature à faire évoluer les mentalités dans le bon sens.

 

M. Valentin SIMEONI. - La langue corse a failli disparaître parce que beaucoup de gens nous interdisaient de parler corse à l'école. J'ai appris le fiançais à l'école mais je parlais corse et quand nous nous retrouvions dans la cour de récréation, nous parlions corse entre nous. Mais tout doucement cela s'est perdu. Aujourd'hui, on découvre le corse mais on parle français. A mon avis, Ia langue s'apprend à l'école mais aussi à la maison et tout petit, l'enfant devrait déjà parler corse. Mais cela ne se fait pas et depuis que l'on en parle, il n'y a pas eu d'évolution dans ce dornaine. Rares sont les enfants de trois ou quatre ans qui parlent corse. Quand on en voit un, on s'émerveille en disant "c'est une exception". Cela ne devrait plus être une exception depuis le temps que l'on parle de la langue corse. Qu'on apprenne à  l'écrire, c'est un fait. Mais ce sont nos ancêtres qui nous ont tous appris à le parler. Et je voudraIs bien

savoir si le président de I'Assemblée a appris Le corse sur les bancs dE l'école ou dans la rue ? Nous sommes un peu responsables de ne pas parler le corse avec nos enfants et de laisser perdre cette langue. Dans les familles, même si la rnère ou le père vient du continent, il y en a toujours un des deux qui peut le parler à I'enfant. Et quand il ira à l'école, l'enseignant lui apprendra à l'écrire mais il sera déjà capable de le prononcer d'une façon ou d'une autre. Je crois qu’il ne faut pas chercher à le parler et à l'écrire en même temps. C'est un retard que nous avons pris à ce niveau. L'éclucatiorr se fait à la maison et ensuite à l'école, et ce sont les parents qui devraient apprcndre à parler corse aux enfants comme nous I'avons

appris. Malheureusement, il y a aussi beaucoup de choses à dire sur ce point car Ie corse est plus ou moins francisé, des mots ont changé. N'y a-t-il pas là aussi un problème? Où est le vrai corse avec 50 % de mots bâtards ?

 

J.THIERS - Je crois qu'il faudrait demander aux organisateurs du Festiventu de prograrnmer plusieurs séances. ll est certain que l'organisation de réunions locales, un peu partout en Corse. contribuerait à aborder la réflexion de manière plus large, et à faire évoluer les mentalités. Des actions au sein de la Maison des jeunes et de la culture de Calvi, si elle existe, ou d'associations de villages, de petites communes, tout cela est destiné à apporter Ie plus grand profit à la cause de Ia iangue et de la culture actuellement minorées. Cela veut dire que dans votre intervention se programme la nécessité de parler de plus en plus souvent le corse et de donner du corse unc image susceptible de contrebalancer, et peut-être de remplacer I'image négative que la langue a prise dans l'esprit des familles. Si, malgré les marques extrêmement fortes de revalorisation de la langue corse, les parents aujourd'hui persistent dans une attitude, une éducation linguistique qui ne laisse au corse qu’une place périptrérique et marginale, cela veut dire, je crois, que I'image du corse n'est pas suffisamment revalorisée clans I'espace social. Les linguistes parlent de "loyauté linguistique", c'est-à-dire d'attachement à une langue ou à une autre que I'on peut repérer à travers le comportement des gens. Or, on peut drre que la loyauté linguistique des Corses en a pris un sérieux coup ! Nous ne reviendrons pas sur les causes historiques mais la question qui se pose à nous est celle d'un traitement pour aujourd'hui et pour demain. Alors je crois que les initiatives à prendre et les actions à programm sont nombreuses et complémentaires. Il n'y a pas de voie unique. Bien évidemment l'école ne sauvera pas la langue si les gens n'en veulent pas. Mais l’école a un rôle fondamental à jouer dès lors qu'il s'agit non seulement d'apprendre à l'écrire mais aussi de montrer la valeur que la société et les institutions attribuent précisément à la langue. Ce n'est que lorsque la langue aura un statut de pleine intégration norr seulenrent à l'école rnais dans tous les secteurs de l'exercice public de Ia langue, que I'on verra les familles revenir tout naturellement à I'instrument d'éducation et de

communication qui a été Ie leur pendant très longtemps. De ce point devue, je crois que la Catalogne peut nous apprendre beaucoup. En effet, au moment où la Catalogne a accédé à I'autonomie, à la fin de

la décennie 70, la situation n'était pas très reluisante au point de vue de la loyauté linguistique. La campagne qui a été entreprise est je crois significative.

 

A.ARGEMÍ. - Je voudrais ajouter une chose qui est importante, à mon avis,pour comprendre comment faire ce saut. Nous avons réussi à l'époque à faire du cataian une langue de prestige. Je parle le catalan et cela me donne un prestige sociai. En général. il y a toujours dans le fait de parler une langue minorée I'expression d'un cornplexe. Il me faut bien parler une langue qui est plus importante parce que j'ai une autre langue d'origine. On perd le prestige de sa propre langue pour le donner à une autre. Or, nous avons commencé à penser que le prestige, notre prestige était de bien parler notre langue. Et cela a tout changé, Ies attitudes, les mentalités. C'était perdre un complexe d'infériorité pour rendre à la langue sa normalité, donc son prestige. Je parle ma langue, c'est la langue de mon pays, je ne la compare pas avec les autres langues. Car si je commence à la comparer avec d'autres langues, je peux évidemment  trouver beaucoup de défauts à ma propre langue mais ce n'est pas la question. La question, c'est que dans mon pays, je parle et m'exprime dans ma langue. Je fais aussi I'effort de parler les autres langues mais en pensant que les autres langues ne vont pas se substituer à la rnienne. Avec ce changement de mentalité, nous avons réussi à récupérer la langue catalane comme quelque chose d'inrportant pour la société qui la parle, qui la parlait et qui peut-être I'avait oubiiée parce qu'on croÿait que parler catalan, c'était parler la langue de dos ancêtres et que ce n'était plus une langue moderne et d'avenir.

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J.THIERS. - Je voudrais dire un mot concernant le prestige. Donner du prestige au plan général et au plan public, c'est aussi afficher les critères qui donnent du prestige. C'est, par exemple, engager une politique résolunent hardie en faveur de l'école, des médias, de l'édition, etc… Le prestige ne peut pas se donner simplement par une déclaration. Il faut aussi que ce soit par des moÿens d'accontpagnement de la langue.

 

M.Guy FIRROLONI - Je voudrais faire trois observarions. Quelqu'un a dit tout à l'heure que les textes sont faits pour les avocats. Pour ma part. je dirais que les textes sont faits aussi pour les procureurs et qu'à partir du moment où un texte s'installe, il devient un instrumeni de référence. Il est Ie témoignage d'un moment dans un combat qui est mené pour la maintenance de quelque chose. D'une façon générale, très peu de textes du droit français ne sont pas le produit d'un combat, notamment en matière de libertés. Nous I'avons vu en particulier à propos de textes sur la presse. La nécessité du texte est donc capitale parce qu’il devient un instrument  de réference qui témoigne d'un moment dans l'évolution de ce combat. Il est capital d'avoir un texte de cette nature, même si on peut penser qu’il ne résoudra immédiatement aucun problème. Il résoudra quand rnême un problème majeur, celui de combler un vide iuridique. Et de ce point de vue, c'est déterminant. D'autre part, je ne crois pas qu'il existe des espaces qui ne soient pas susceptibles d'être des lieux de combat. Tous les espaces, à quelque niveau que ce soit et quoi qu'il s'y passe, nécessitent ce combat. Je voudrais revenir sur ce qui a été dit à propos des perversions auxquelles on assiste et du terme de "protection". Il arrive un moment où le combat est tel que des situations nouvelles se créent et se créent par ailleurs des adaptations à ces situations nouvelles, notamment celles qui naissent dcs conflits. Je crois que ce discours sur les langues minorées qu'il faut protéger, et donc maintenir en situation minorée, est un point très important chez nous actuellement. J'ai le sentiment qu'un cerlain nombre de mesures qui nous ont été proposées il y a quelque temps -on peut notamment

parler des classes bilingues- sont autant d'exemples qui nous montrent qu'il faut être extrêmement vigilant sur ce glissement progressif en terrnes de rapports avec le pouvoir. Nous sommes dans la situation où l'on tente en perrnanence de recréer de nouveaux cadres s'adaptant évidemment aux nouveaux conflits qui ont été provoqués ces dernières années. Et là aussr la nécessité tle la vigilance, la nécessité des textes pour éclairer le chemin de chacun me paraît impérative. Pour cette raison, des textes de cette nature me paraissent importants. Je terminerai en posant une question relative à l'anccdote que Aureli Argem  nous a racontée : un Espagnol rencontre un Catalan, ils ne se comprennent pas et I'un et !'autre pensent: "Le pauvre, il ne connaît pas ma langue". Que pensez-vous du paysan qui, dans cette situation, dirait : "il ne connaît pas ma langue, mais moi je peux lui rêpondre dans la sienne". Autrement  dit : que pensez-vous des gens qui, parce qu'ils étaient dans une situation de dominés, ont fait un effort considérable pour s'adapter et ont ressenti ce besoin en disant: "ll est absolument nécessaire queje parle la langue cspagnole parce que je dois m'adapter, et c'est à moi de faire l'effort" ? Je reviens sur le propos

de Jacques Thiers tout à I'heure . Pendant des années on a entendu dire : "ll n'est pas poli de parler la langue corse en présence de gens qui ne sont pas corses. Il est donc nécessaire de faire I'effort de parler leur langue." Que pensez-vous de cela ?

 

A.ARGEMI. - Je voudrais tout d'abord terminer la question que pensez-vous de celui qui ne parle pas le catalan? Là est le problème. Les Catalans sont tous bilingues mais pas les Espagnols. Les Espagnols n'ont pas compris le problème. Les Espagnols sont monolingue et ils pensent qu'avec l'espagnol ils dominent la situation. J’ai appris I'espagnol et je suis très content de le parler. mais je l'ai appris d'abord parce qu'on rm’a obligé à l'apprendre à l'école, et ensuite parce que je devais être poli avec les Espagnols.

Mais on n'a pas imposé aux Espagnols d'apprendre le catalan pour êtrc polis avec les Catalans quand ils se trouvent en Catalogne.

 

G.FlRROLONI - Je ne connais aucun exernple dans le monde (c'est vrai pour la langue mais ça I'est aussi pour un ensemble de comportements notamment dans le domaine éconornique) où celui qui est économiquernent fort, se préoccupe un instant de l'économiquement faible. Et ce n'est pas simplement par paresse intellectuelle, c'est sirnplement le rapport naturel qui s'installe dans toute relation entre un dominant et un dominé. On a toujours vu les dominés créer les conditions de I'adaptation.

 

A.ARGEMÍ. - Si cela va dans ce sens, si l’on maintient cctte mentalité que pour être poli. il faut parler la langue de l'autre, on reste dans Ia mentalité que l'on est inférieur. Et c'est le pire ennemi pour sa propre langue. La seule chose que je voudrais répondre à cette question, c'est oui, pour être poli je dois parler la langue de I'autre, I'espagnol, Ie français, l'anglais el d'autres langues cncore davantage. Mais ce qu'il faut dépasser, c'est la mentalité avec laquelle on veut imposer l'autre langue. On veut irnposer la Iangue sans changer les mentalités, ce qui fait que l'Espagnol n'a pas changé et n'a pas compris que peut-être que, pour comprendre le catalan, quand il sera en Catalogne, il devra faire un effort pour parler. L'Espagnol reste monolingue. Et I'un des problèmes que nous avons en Catalogne, c'est qu'une grande partie de la population provient d'autres zones qui ont pour langue l'espagnol. Cela a commencé à créer une certaine rnentalité chez les Catalans parce que I'Espagnol se dit : "Pourquoi devrais-je apprendre le Catalan ? » Nous avons donc décidé de renforcer notre concept. Il y a deux langues officielles en Catalogne, I'espagnol et le catalan, mais la langue propre du pays, c'est le catalan. Je me trouve dans ce pays, si je veux y rester, être un des leurs, je dois parler le catalan parce que c'est naturel et normal. C'est la normalité non forcée, la normalité quand on vit dans une communauté. Mais la question peut rester la même. Pour être poli, il faut parler la langue. Mais pour être poli, il faudrait changer la mentalité et faire son possible pour apprendre la langue de I'endroit où l'on se trouve. Si cet esprit existait, les choses seraient très diffërentes. Peut-être que les Espagnols n'apprendraient pas le catalan parce que leur passage en Catalogne serait circonstanciel, mais l'esprit serait différent. Et la Déciaration aide justement à changer I'esprrt de tous ceux qui parlent les langues soi-disant rnajoritaires et de ceux qui parlent les langues soi-disant minoritaires, pour que toutes les langues arrivent au rnême degré de respect.

 

J.THIERS. - Merci Aureli. Nous avons trois questions ou trois réactions. Pour que nous puissions conciure car la matinée a été bien nourrie, il faut se donner un temps, Quand les trois questions ou réactions auront été exprimées, nous verrons s'il y a autre chose à ajouter.

 

M. Charles CAST'ELLANI. - Quelqu'un a dit tout à l'heure que les parents ne parlent plus corse à lcurs enfants. C'est une réalité. Mais si les gens ne le parlent plus, c'est parce que dans leur esprit le corse ne sert à rien. À quoi bon apprendre une langue qui ne sert à rien ? Pour changer cette mentalité, je pense qu'il faut rendre une dignité à la langue et lui donner un espace légal qui n'existe pas aujourd'hui. Si je pousse le raisomement jusqu'à I'absurde, je dirais qu'il ne faut pas apprendre la langue à l'école primaire de façon illégale. En effet  on apprend la langue corse actuellement, ou plus

exactement  «  les langues régionales" en vertu de la loi DEIXONE. Or, la loi DEIXONE qui a été votée en 1951 par le Parlement  n'incluait pas le corse. Ce n'est qu'en 1974-1975. par un décret du ministre de I'Education nationale de I'époque, que I'on a autorisé le corse. Mais je ne pense pas qu’un simple décret ministériel puisse modifïer une loi. Il faut donc lui donner un espace légai. que l’on peut trouver à travers la Déclaration universelle des Droits Linguistiques mais aussi à travers la déclaration de la Charte Européenne des Langues Minorées. Cette charte a été signée par plusieurs pays européens, mais la France, retardataire dans ce domaine, traîne la patte et ne signe pas. Je pense que s’il y a une prise de conscience de tous et de nos élus, si chacun pousse dans le mêmre sens, peut-être cet espace légal sera-t-il arraché à travers Ia Charte européenne.

 

J.THIERS- Il est certain que les deux sources convergentes, d'une part l'initiative individuelte et militante consistant à élargir I'espace symbolique de la langue, à lui donner des gratifications plus nombreuses, et d'autre part I'initiative plus officielle et plus visible  dans I'efficacité et la pérennité de la puissance publique se prononçant en faveur de la langue, de sa protection et de son extension sont des éléments qui vont vers une irnplication plus grande des indiridus dans la prise de position et dans Ia prise de possession de la langue.

 

V.SIMEONI- C'est  Paris qui propose des solutions à nos élus et non l'inverse. Tant que cela se passera de cette rnanière, où irons-nous ? Ce sont nos élus qui doivent dire au gouvernement : « Attention ! La Corse c'est autre chose et il y a une langue ». Mais en toute chose, on attend que Paris vienne nous dire : "Vous les Corses, vous devez faire ça. ». Et nos représentants sont au garde-à-vous et disent merci.

 

J.THIERS- Le texte du Conseil Economique, Sociat et Culturel que je citais tout à l’heure faisait état de la décision de l’Assemblée de Corse du 9 février 1991 qui est une référence importante, prise en

faveur de Ia ratification par Ia France de la Charte Européenne des Larngues Régionales ou Minoritaires. C'est une prise de position publique de la personnalité régionale corse. II nous appartient de Ie mettre en lumière à tout moment pour que nous nous y référions et pour consolider ce que l’on devrait appeler -et ce que certains lingulstes appellent-  « la volonté populaire » en faveur de

I'accroissement du statut de la langue.

 

C.PANTALACCI. - J'ai entendu tout à l'heure la phrase : "Le corse s'apprend à la maison. C’est vrai, ce fut vrai mais ça I'est moins aujourd'hui. Je trouve ce discours très restrictif pour différentes raisons. D'une part, les couples sont souvent mélangés mais il y a une autre raison qui me semble importante. C’est qu’une aire linguistique est aussi une aire sociale. Aujourd'hui, d’autres personnes ont envie de s'approprier cette langue. J’ai 10% d'élèves maghrébins, ce sont mes meilleurs élèves,  et cette démarche qu'ils font vers la Iangue corse ne peut passer que par l'école. Et il me sernble très important qu’elle passe par I'école parce que c'est l'école qui lui donne son statut et sa valeur. Si cela se passe en dehors, les Corses qui l'ont vécu devraient en avoir conscience, si c'est à la maison, c’est une langue minorée. II faut donc qu'elle passe par l'école pour être valorisée et acquérir une certaine dignité. Et c’est une question qu'il ne faut pas évacuer.

 

M.Paul FILIPPI. - Il n'y a pas à mettre en opposition I'école et la famille. Ce que M.SIMEONI a dit est vrai, ce que dit Mme PANTALACCI l’est aussi.

 

J.THIERS. - Il y a en effet une complémentarité, une action conjuguée nécessaire de l’école et de la famille. Non pas pour servir la langue mais pour servir les intérêts bien compris...

 

C.PANTALACCI. - De l’espace culturel et linguistique...

 

J.THIERS. - De I'espace culturel et linguistique, et donc des enfants qui sont d’ailleurs le premier objectif de cette réflexion. Nous parlerons cet après-midi précisément de ia langue corse à l’école.

La vocation de cette matinée était de balayer assez largement ia situation en Corse pour voir dans quelle mesure elle pouvait réagir favorablement à cette circonstance de la présentation de la Déclaration Universelle des Droits Linguistiques.

 

( à suivre avec la prochaine mise à jour du 15 juin 2019)