Versione :
Francese

Dans le pays qui ne me connaît pas

dans le pays qui ne me connaît pas
le temps déchiré
un œil crevé
gît dans un coin de rue
dans la pénombre d’un pays où
le sommeil est le seul vestige de mon savoir
de vivre de sentir de m’abriter
coup d’œil sur un amour glacé
dans l’atelier du sculpteur susceptible
d’être resté enfant jusqu’à la mort
il chasse la lune plongée au tréfonds de lui-même
dans sa façon de voir rien qui ressemble à la folie
de maïs le ventre de la lune dévoré par la faim
du rêveur aux dents qui rompent la croûte de la magie
des vols trempés dans le bleu-noir du ciel dans
le miroir de la nuit des tournesols penchent leurs
têtes de beauté endormie parfumée de branches vertes
sans souci l’éclat de la vie ordinaire
comme le cœur du poisson aveuglé par l’amour- propre
dans ce pays où je rêve mes journées
sans souliers de cèdre les montagnes sur le tapis d’une
mer jamais vue jamais respirée
écoute le rire affolé du genou
caché par mes mains gantés de froid
dans la chambre déserte
c’est le vent qui fait peur aux murs
il fait danser mes larmes jamais pleurées
des cicatrices d’inquiétude sur les épaules fatigués
d’insomnie je songe que je fais un voyage
dans l’île à l’air de Gorgonne apprivoisée
de sable et d’écume les visages des anges
qui ont salué ma présence sur cette terre
jamais vue jamais connue

Corti, le 1 janvier 2005