Démanteler des certitudes
Puesia
DUMAS Catherine
Il est difficile à présent de mentir, de croire
que les mots puissent ne pas brûler.
Ils ont été trop nombreux les incendies
qui sont passés d'un siècle à l'autre.
Vois comme se ressemblent leurs visages,
la trace de suie qui les défigure
est une comète fugitive, mais nous nous savons
que certains mots sont passés au travers du feu,
plus maigres que les corps, plus insidieux,
pleins de sens recouvrant mille couleurs
et mille de plus non encore écloses. Combien de fois
la servante a-t-elle choisi qui servir ?
Et par terre toujours le même sang,
toujours les mêmes yeux qui démantèlent
des certitudes. Nous ne pouvons plus croire
que les mots ne défigurent pas les corps,
qu'ils n'enflamment pas. Il est trop tard et les mots qui nous habillent
sont fatigués. Il est trop tard depuis Abel,
depuis le paradis. Cet après-midi
quelqu'un, quelque part, écrit un mot
qui n'a pas encore été écrit, un mot léger
blessant les tempêtes et bien qu'il soit trop tard
il est encore tôt, et les mains s'ouvrent avec ce mot
qui marche lentement vers sa poussière.