Versione :
Francese

Six chants

traduction en français de Martine VANHOVE

 

I. LE COEUR DE L'UNIVERS
Le coeur de l'univers quand il se déchire
bien peu le réalisent - des marginaux
qu'une brise pousse et fait choir. Souffrance
silencieuse, chiquenaude à la surface de l'eau,
déchiré est le coeur de l'univers, tel un désir
percé laissant le sang suinter puis saigner à mort.

II. ELLE ME SEMA SOUVENT CE RIDEAU
Elle me sema souvent ce rideau de silence.
J'allongeai la main pour t'atteindre, fruit lourd.
Je cultivai des ailes pour te dérober, étoile.
Je t'arrosai le soir pour que tu éclosese fleur.
Elle me sema souvent ce silence. Si vacille
en cette nuit ma lanterne, je discernerai ton visage
comme une barque cachée à l'horizon,
tes yeux ne s'éteindront pas, et c'est assez.

III. TES YEUX
Goûte encore à ce rlève et quand tu seras rassasiée
guette à nouveau la faim. Il n'est d'autre mets que lui.
Il est un rêve qui embaume au rythme de chaque nuage,
dans la feuille qui se balance et dans la fleur
qui s'ouvre pour être aimée. Il est un rêve dans le nid,
il est un rêve dans la falaise ébahie, mausolée,
il y a le plus beau rêve dans tes yeux, tes yeux la mer,
tes yeux qui appellent le marin pour qu'il y sombre.
Goûte encore à ce rêve. Il n'est d'autre mets que lui.

IV. LE DESIR EST UN STYLET
Le désir est un stylet : il perce et fait jaillir
la source du sang, puis le coeur saigne à mort.
Le passé est un rideau de théâtre : il s'abat
sur une scène hagarde devant un parterre vide.
La pensée est une vielle : elle creuse toujours
et tourne et fleurit au-dedans sans aboutir.
Le coeur est un poème : il étreint en lui
les futilités d'un univers froid.
Le désir est un stylet : tu l'as entré en moi.

V. BLANCHEUR
Il est une plante muette qui pousse à la fenêtre
attendant que la rosée descende et l'endorme,
et il y a tes yeux, étoiles d'une nuit blanche.
Il est une lune solitaire qui brille silencieuse
attendant que les nuages s'effacent devant elle,
et il y a tes joues, l'aurore d'un jour blanc.
Il est un coeur qui contient l'univers en lui,
attendant que le sang déborde et se divise,
puis il y a toi, blancheur d'un autre temps.

VI. DEMAIN EST POUR TOI
Demain je viendrai et j'apporterai avec moi
une écuelle emplie d'eau pour t'abreuver.
Demain j'irai au jardin et je couperai
la plus belle brassée de fleurs pour toi.
Demain je parcourrai me vigne
et je couperai pour toi toutes les grappes.
Demain j'ôterai le coeur de ma poitrine
et te le donnerai. Demain je serai mort.