Par un jour d'hiver
Puesia
DUMAS Catherine
L’homme de la boucherie est mort. Il a laissé une femme,
deux enfants et de la chair fraîche étalée comme du linge
sur le séchoir. Je me rappelle l’orgueil avec lequel il passait la main
sur sa nuque. Je me rappelle de la poissonière
qui nous réveillait le matin «poisson frais
tout brillant» et comme était cher le râle de la sole.
Même la laitue est fraîche après sa mort,
la botte de fane de navets, même d’une carotte nous attendons
qu’elle soit fraîche dans l’assiette avec la sole rigoureusement
séparée des arêtes. Si frais! L’homme de la boucherie
va être enterré après le déjeuner. Il gît maintenant dans la chapelle
mortuaire, le visage découvert pour la famille et les curieux. L’homme
de la boucherie est mort fatigué, mais maintenant il est frais:
il a été abattu hier, il sera emballé à quatre heures de l’après-midi.