Marie FERRANTI : CORS’ODISSEA

 

 

1. Le projet

Voilà une tâche bien ardue : Présenter en seulement quelques lignes ce projet née de l’imagination d’un écrivain, qui plus est d’un écrivain qui a toujours su unir avec talent, imaginaire et réalité, présent et passé. C’est le propre de l’écrivain me direz-vous ! Mais par ce projet, on s’ouvre avec bonheur à l’escalade des ambitions, notamment celles qui, en référence à l’Odyssée d’Homère nous invitent au voyage, intérieur et physique, nous incitent à la découverte et à la contemplation, interactives, nous exhortent à l’interprétation et à la ré-acquisition. En effet, c’est bien d’un « riacquistu » dont il s’agit, toutes proportions respectueuses gardées envers celui, historique, qui devait définitivement, ici, changer autant les rapports sociétaux que la manière de nous projeter dans l’avenir.
Le « riacquistu » originel a marqué son époque et un changement d’époque, notre projet, plus modestement se propose d’appliquer la même recette non pas pour changer le monde, notre monde, mais pour apprendre à le redécouvrir, à le connaitre, à le reconnaître et à l’acquérir à nouveau.
On ne comprend bien que ce que l’on vit, alors nous nous proposons avec un groupe d’artistes, de citoyens, d’universitaires de vivre par l’itinérance, le territoire, ou plutôt les territoires de notre île, cette « terra incognita ».
Marie Ferranti, nous montre une direction, des étapes, il nous reste à l’accompagner dans sa Cors’Odissea et à en inscrire le chemin, dans la durée par un périple de trois années sur l’ensemble de la géographie physique et humaine de notre Corse.

1.1. Sa structure

Le projet est multiforme. Il se construit durant trois années en plantant des balises marquantes, à la fois matériellement, dans des lieux précis, à la fois par des créations relevant d’une culture immatérielle, celles que la rencontre, fortuite ou programmée peut enfanter. Le projet s’enrichit, en effet, des rencontres entre « les voyageurs » et les « populations sédentaires » visitées lors du périple à travers l’île.

1.1.1. Les voyageurs
Certains des voyageurs qui accompagneront Marie Ferranti dans sa « Cors’Odissea » sont déjà identifiés, comme par exemple, les chanteurs du Groupe I Campagnoli ; des artistes, en majorité, des poètes de langue corse ; mais aussi des administrateurs de collectivités locales qui nous ouvrent les portes et les bras multiples de leurs réalités ; des responsables associatifs ; certains citoyens qui au-delà de toute fonction, sont curieux et friands de ce voyage particulier et unique. D’autres, d’ici et d’ailleurs seront ramenés au son de la corne de brume : elle marquera l’appel à l’embarquement, des sociologues, des linguistes, des géographes, des cuisiniers, des philosophes, des historiens, des psychologues….

1.1.2. Les résidences d’hiver
Le socle du projet, son armature, est constitué d’une série de « résidences » itinérantes et vagabondes, aux quatre coins de Corse, pendant trois hivers successifs, en réalité, de novembre à mai.
Les résidences consistent à venir s’installer dans un village pendant quelques jours afin, au contact de la population, d’observer et de capter la réalité présente et les témoignages du passé, au contact de la population. Avec les résidents, comprendre ce qu’est cette réalité telle qu’ils la vivent tout au long de l’année et au fil des années, en extraire un regard partagé, sinon une vision, et en re-proposer une interprétation par la mise en place d’ateliers, artistiques et pédagogiques et des conférences.
Trois hivers donc trois saisons de résidences, de novembre à mai, à raison d’une résidence par mois, 7 résidences par saison, le temps de marquer d’une empreinte affective et créative de nombreux lieux d’accueil, de nombreux lieux hors la ville, au cœur de la Corse rurale, le Cap-Corse, la Castagniccia, le Taravu, le Nebbiu, i paesi di Balagna, mais aussi, l’Alta-Rocca, Bunifaziu, et tant d’autres encore, le programme n’est pas figé.
Ces « résidences », ces courtes permanences en ces lieux devront être soigneusement préparées. La rencontre pour être efficace en si peu de jours devra donc être préalablement documentée, calibrée, annoncée.
Par ailleurs, d’autres rendez-vous de restitution seront organisés, in situ au moment d’autres manifestations ou fêtes au village, à distance par l’utilisation des nouvelles technologies et les réseaux sociaux.

La première saison d’hiver sera lancée au mois de Novembre 2013, à Olmi Capella, une saison d’ouverture un peu spéciale car elle servira de cadre à la préparation d’un grand spectacle construit autour d’un concert du groupe « I Campagnoli », spectacle programmé au mois d’octobre 2014 au Théâtre de Bastia.

1.1.3. Les chroniques
Le projet a une plume, il s’en sert. Marie Ferranti, l’œil et les sens en éveil, presque en alerte, chroniquera chaque étape du projet et bien entendu le moment des « résidences » sera celui privilégié du témoignage romancé, interprété ou simplement raconté.
Marie Ferranti, un peu comme une prémonition, une anticipation au projet a commencé un livre de chroniques sur le parcours des Campagnoli qui chantent ensemble depuis près de vingt-cinq ans. Ce livre, « Les Maîtres de chant », s’élargit ensuite sur le Riacquistu et lui a donné l’occasion de travailler régulièrement avec Petru Guelfucci, qui en est le fil rouge. Le manuscrit a été accepté par la maison d’édition Gallimard.

Les chroniques du projet viendront donc enrichir un capital littéraire déjà affirmé.

1.1.4. I Campagnoli
« Ce projet est une alliance entre plusieurs artistes, pratiquant tous un art différent. I Campagnoli chantent ensemble depuis près de vingt-cinq ans. Je les connais depuis longtemps, car la plupart sont issus de ma région, le Nebbiu. J’ai admiré leur courage : malgré les difficultés de tous ordres, ils ont continué à chanter. J’admire surtout leur talent. Il m’a semblé retrouver en eux une mélancolie archaïque, chère à mon cœur, et quasiment disparue désormais. Je me suis étonnée qu’ils n’eussent pas davantage de moyens pour exprimer leur art. Ange Orati, un des membres fondateur du groupe, m’expliqua-t-on, était leur parolier. Il les avait quittés en 2008. Ils se sentaient désemparés, n’ayant plus de chansons nouvelles. Je sentis un découragement proche de l’abandon. Je m’en alertai. Je fis appel à mon ami Jacques Fusina, qui, avec la générosité qu’on lui connaît, consentit à écrire pour eux de nouvelles chansons. » Marie Ferranti

I Campagnoli seront des compagnons de voyage importants. D’ores et déjà au cœur du dispositif, ils seront à la fois les voix et les collecteurs de mémoire du projet. En effet, ils offriront leurs propres chants mais ils s’emploieront aussi, comme d’autres avant eux, à rechercher et enregistrer ces personnes qui, dans chacun des villages visités, sont encore là pour exprimer les différentes façons de chanter, « i versi », dont la diversité fait toute la richesse.
I Campagnoli seront ainsi au centre de différentes productions du projet :
- Un album dès le début du projet : Concrètement, dès la fin de l’année 2013, I Campagnoli enregistreront un album de leurs nouvelles créations. La prise de son s’effectuera directement, dans l’enceinte d’une église afin de garder toute l’atmosphère et les « imperfections » que l’enregistrement en studio a tendance à lisser et à gommer.
- Un spectacle : Un grand spectacle, bâti autour d’un récital du groupe, sera monté au Théâtre de Bastia au mois d’Octobre 2014, puis à l’Espace Diamant à Ajaccio en novembre.
- Une production vidéo : Un producteur/réalisateur affirmé réalisera un documentaire spécifique sur cet itinéraire des Campagnoli. Des résidences d’Olmi Capella durant lesquelles sera préparé le spectacle de Bastia, jusqu’à la soirée proprement dite au Théâtre, tout sera concentré dans un témoignage vidéo, réalisé dans un format propice à la diffusion TV ou en dvd.
- Un autre album témoignage en fin de projet : I Campagnoli enregistreront un deuxième album en fin de projet. Celui-ci proposera une libre réinterprétation des chants « collectés » les plus marquants. Cet album sera illustré des œuvres des artistes ayant participé au projet et notamment aux expositions itinérantes (cf. paragraphe 1.1.6)

1.1.5. Le grand spectacle au Théâtre de Bastia
Il est une des balises les plus significatives du projet. Il se situe au bout d’une année de vie du projet et permettra de mesurer la validité de l’intention initiale. C’est une soirée ambitieuse, qui pourra ensuite se déplacer dans d’autres lieux de Corse (par exemple à Ajaccio à l’espace Diamant) et d’ailleurs, notamment auprès des différentes associations de la diaspora corse.
Toute la première saison des résidences, à Olmi Capella, est axée sur l’écriture, la conception, la préparation et la répétition de ce grand spectacle. Il associera au chant des Campagnoli d’autres formes artistiques.

1.1.6. Une exposition itinérante d’artistes
« Nous voulions que ce mariage des arts soit présent. Ainsi, avons-nous composé une sorte d’itinéraire. Una Volta, dirigée par Mme Dominique Mattei, présentera une grande exposition de plusieurs œuvres de chaque artiste. Certains artistes seront présentés à la Cave Orenga, à Patrimonio. Henri Orenga est, en effet, un des premiers à avoir répondu à ma demande de participer à ce projet. Nous avons rencontré Mme Marie-Jeanne Nicoli qui nous a ouverts les portes de l’Espace Diamant. Quand cela sera possible, l’exposition voyagera avec nous. »
Marie Ferranti

Le Monde a changé, c’est une évidence, et il continue de changer à une vitesse vertigineuse comme jamais auparavant. L’artiste commente, illustre et participe à ce changement et pour cette raison, il ne pouvait être exclu de notre voyage, il devait même en être l’illustrateur privilégié.
Une exposition, dont la forme et les dimensions seront adaptées à chaque étape, accompagnera nos présences dans les villages et dans d’autres endroits plus spécifiquement adaptés à la recevoir. « Una Volta » à Bastia, « L’espace Diamant » à Ajaccio, la Cave Orenga à Patrimonio, Bonfacio, certains des villages visités par nos « résidences », voilà déjà des sites où, non seulement l’exposition pourra être présentée , mais où elle sera l’occasion d’organiser des ateliers artistiques de rencontres avec les populations et notamment les enfants.