A PROPOS DE A BARCA DI A MADONNA

En tout cas, ce n’est pas l’aspect subjectif qui m’a porté à écrire sur le thème. Je crois en effet que ces grands événements sont des révélateurs puissants de la sensibilité d’une communauté évoquée à un tournant de son évolution. En tant que tels, ils participent d’une conscience d’histoire et expriment de manière figurative les secousses qui toujours marquent les moments décisifs. L’épisode de Notre Dame du Grand Retour a marqué les Corses parce qu’il est survenu dans l’une de ces périodes. Dans ces années du Grand Retour à la paix se réaffirmaient les structures traditionnelles d’une société ébranlée par plusieurs années de conflit mondial, mais en même temps se mettaient en place des éléments qui allaient profondément modifier, par la suite, la forme et la substance des identités et des conditions de vie. 
Ces traces ambigues de la mémoire collective forment un terrain de prédilection pour l’écriture littéraire telle que je me la représente.

A Barca di a Madonna a été publié chez Albiana en mars 1996. Or j’ai eu la surprise de voir Grasset sortir en août  La Vierge du Grand Retour de Raphaël Confiant, le romancier martiniquais et francophone. Bien entendu, les deux livres sont très différents, d’abord par le talent et le succès. Les oeuvres créoles ont su produire une véritable littérature, avec des créations qui sont magistrales alors que la Corse littéraire est loin de la reconnaissance. Pour le sujet proprement dit, il y a déjà dans le Texaco de Chamoiseau des déambulations de la Madone sur une yole. Quant au livre de Confiant, il retentit de la clameur qui annonce, entoure et suit l’arrivée de Notre Dame de Boulogne devenue Notre Dame Du Grand Retour dans la France. C’est la voix multiple et contradictoire du peuple martiniquais qui monte autour de la Vierge, dans la période de l’après-guerre et de la décolonisation... 
C’est un roman admirable, par la peinture variée des caractères et l’art des portraits. Mais il y a surtout une esthétique luxuriante et baroque, un rythme et une verve assurée par une langue libre, inventive et qui joue de toutes ses ressources. Un livre virtuose. Quant à la similitude de l’époque et de la thématique religieuse, plus que d’une coïncidence, je parlerais d’une concomitance d’imaginaires et d’émotions. Le rapprochement n’est pas fortuit. Il y a dans ce grand événement religieux une atmosphère qui fascine et qui étonne notre sensibilité et notre esprit critique de modernes.
Les chroniques de l’époque mettent en exergue le choc émotionnel de la scène, l’apparition de la Madone venue de la mer, les foules en prières, une affluence considérable, une ferveur populaire réelle... Une véritable mise en scène aussi pour la statue et la barque dans laquelle les fidèles jettent leurs offrandes sous le regard des pères blancs, Missionnaires du Grand Retour, les fastes d’une liturgie riche et ornée, partout une liesse et des dévotions très spectaculaires: tout cela a frappé les imaginations des gens à l’époque. A plus forte raison le romancier trouve-t-il dans ces souvenirs un réseau d’images fortes et de sentiments presque violents tant leurs manifestations sont ostentatoires. C’est frappant lorsqu’on interroge aujourd’hui les gens qui ont assisté et participé à cet épisode; ils en parlent avec une nostalgie émerveillée, mais à ces sentiments se mêle un embarras confus, comme s’il y avait quelque duperie dans l’orchestration de cette ample et longue cérémonie. Il y a là un très bon sujet de film..

Mais ces aspects spectaculaires ne sont pas tout. Il y a d’autres motivations pour deux écrivains insulaires, issus de communautés typées et soumises dans leurs histoires respectives à des modes de penser et de croire venus des centres dont ces cultures dominées dépendent. Dans le livre de Confiant, les déclarations des autorités religieuses assurent que la Madone vient sauver le peuple martiniquais. Pendant trois mois de 1948 les cantiques et les offrandes répondent à cette propagande dans des scènes d’hystérie collective. Ces gens croient définitivement abolies par la Madone les formes modernes de leur condition d’esclaves. Même si ce n’est pas la visée première de l’auteur, on peut dire qu’à travers la peinture des réactions psychologiques et de la folle espérance des Martiniquais La Vierge du Grand Retour dénote d’une préoccupation sociale et identitaire éminente.
En Corse le séjour de la Vierge du Grand Retour a duré d’avril 1947 à janvier 1948. Outre la différence des cultures, il a dû avoir une portée idéologique notable si l’on tient compte du fait que l’île avait été directement impliquée comme territoire envahi, occupé et libéré au cours d’opérations militaires. L’événement religieux a donc très vraisemblablement revêtu une signification politique dans des régions très fortement soumises à l’influence communiste du fait du rôle joué par ce parti dans la Résistance et la Libération. Les spécialistes d’histoire et de sociologie religieuses mettent en lumière ces aspects historiques du culte marial. Je me suis servi de cet arrière-plan idéologique de luttes et de conflits pour bâtir ma fiction.
Mais bien entendu, un roman n’est pas un document historique. Il témoigne d’une autre réalité que les faits qui se sont effectivement déroulés dans l’histoire. Le roman a sa propre histoire, qui est toujours une fiction, une recomposition du réel, un mensonge si l’on veut. Pour en revenir à mon roman, je dirai qu’il puise dans les circonstances du passage de la Madone du Grand Retour en Corse des effets qui entendent donner l’illusion de faits réels. C’est sur une explosion de piété populaire voulue et canalisée par la puissance des idéologies dominantes que se développe la souffrance de Maria Laura. Face au mystère d’une naissance qu’elle croit marquée par une tragédie familiale, son esprit malade a recomposé l’histoire d’une origine qui se dérobe et jeté la suspicion sur les choses et les êtres. Dans ces conditions, la grande figure de la Madone à la Barque prend pour elle l’aspect d’une idole menaçante autour de laquelle la fiction se déploie.

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Come è nato il suo ultimo rumanzo A barca di a Madonna?

Innanzitutto, come spesso accade in letteratura, una folgorazione, un'immagine inafferrabile a lungo e che un giorno scopre un lembo di
memoria nascosto e riporta impressioni, ricordi, sensazioni, creando anche turte le condizioni favorevoli al volo dell'immaginazione. Un  ricordo personale in effetti: l'immagine di una madonna con un bambin Gesù, tutta bianca, messa in cima a una barca che scivola su una marea umana! Da tutti i villaggi der circondario si erano accalcati presso la croce di Santa Lucia per salutare Notre Dame de Boulogne in processione solenne in Corsica dall'aprile del 1947 al gennaio 1948. Non appena questo ricordo ha fatto irruzione nella mia coscienza soro solo qualche anno fa, mi ha profondamente turbato. Ho interrogato i miei parenti e, passendo da un argomento, all'altro l'interesse è cresciuto: ricerche, letture della stampa dell'epoca e studi critici hanno rafforzato la mia passione per quest’episodio affascinante.

Comunque, non è 1'aspetro soggettivo che m’ha portato a scrivere su questo tema. Credo che questi grandi avvenimenri siano potenti rivelatori della sensibilità di una comunità osservata in un momento di cambiamento della propria evoluzione. In quanto tali, partecipano di una coscienza della storia ed esprimono in maniera figurativa le scosse che caratterizzano i momenti decisivi. L’episodio di Notre Dame del Gran Ritorno ha marcato i Corsi perché è accaduto in uno di questi periodi.
Negli anni del Grande Ritorno alla pace si riaffermarano le strutture tradizionali di una società provata da molti anni di conflitto mondiale, ma, al tempo stesso, si stavano instaurando elementi che avrebbero profondamente modificato, in seguito, la forma e la sostanza delle identità e delle condizioni di vita.
Queste tracce ambigue della memoria collettiva costiruiscono il territorio privilegiato per la scrittura letteraria, perlomeno per come me la rappresento.
A barca di a Madonna è stato pubblicato nel marzo 1996, e ho avuto la sorpresa di veder uscire in agosto presso Grasset La Vierge du Grand Retour di Raphaël Confiant, il romanziere martinicano. In esso riecheggia il clamore che annuncia, circonda e segue l'arrivo dr Notre Dame de Boulogne, divenuta Notre Dame Du Grand Retour in Francia. È la voce multipla e contraddittoria del popolo martinicano che sale intorno alla Vergine, nel periodo del dopoguerra e della decolonizzazione...
Le cronache dell'epoca mettono in risalto lo choc emotivo della scena,
l'apparizione della Màdonna venuta dal mare, le folle in preghiera, un'affluenza considerevole, un fervore popolare reale... Ma questi aspetti spettacolari non sono tutto. Ci sono altri motivi per due scrittori insulari, figli di comunità caratterizzate e sottomesse, nelle loro rispettive storie, a modi di pensare e di credere venuti dai centri dai quali queste culture dominate dipendono.
In Corsica, il soggiorno della Vierge du Grand Retour, ha avuto una portata ideologica notevole. L’avvenimento religioso ha molto verosimilmente rivestito significato politico in regioni a forte influenza comunista a seguito del ruolo che questo partito aveva svolto durante la Resistenza e la Liberazione. Gli specialisti di storia e di sociologia religiosa mettono in luce soprattutto alcuni aspetti storici del culto mariano. Mi sono servito di questo sfondo ideologico di lotte e di conflitti per costruire la mia narrazione.
I1 romanzo ha una sua propria storia, che è sempre una finzione, una ricomposizione del reale. Per ritornare al mio romanzo. dirò che esso prende dalle circostanze del passaggio della Madonna del Gran Ritorno in Corsica solo alcuni effetti che danno l'illusione di fatti reali. È su un'esplosione di pietà popolare voluta e canalizzata dal potere delle ideologie dominanti che si    sviluppa la sofferenza di Maria Laura, di fronte al mistero di una nascita che lei crede marcata da una tragedia familiare, il suo spirito malato ha ricomposto la storia di un'origine che si nasconde e getta il sospetto sulle cose e sugli esseri. In questo contesto la grande figura della Madonna della Barca si fa per lei idolo minaccioso intorno al quale la narrazione si dispiega.

(p.89 à 91 de Venature mediterranee)