Les Portes de l’Aube : extrait
Attività altre
27 décembre
Les amitiés sont comme les feuilles accrochées aux arbres. Elles se détachent dès que le vent tourne, dès que le froid s'installe, juste avant l'hiver...
1er janvier
La plume est-elle une arme qui permet de s'extirper du désarroi ? Non, cela n'arrange rien. L'encre laisse une trace du temps présent, il ne permet pas de changer l'avenir. On peut écrire un mensonge, ou la vérité, on peut parler du passé, ou de ce qui n'est pas encore né mais la réalité, elle, dépasse l'encre et la feuille et demeure immuable et impitoyable.
***
Face à la feuille. Les mots ne s'annoncent pas. Pourtant mes émotions n'attendent que l'explosion. Qu'écrire ? Et pourquoi ? Le sais-je seulement ? C'est une intuition, celle qu'il y a ici quelque chose qui peut être moi. Mais ce n'est pas la seul. Hélas ! Un pressentiment tout aussi fort m'enrobe de sa présence. Celui qu'il n'y a là que des réponses. Quant aux interrogations, celles qui déclenchent les avalanches d'idées, qui grandissent les plus petits des hommes, elles ne se montrent pas de cette manière. Le papier reste vierge. Seul mon nom griffonné trône dans un coin, Andria Abama, roi raturé d'une feuille sans sujets.
***
Un incontrôlable rire nerveux s'empare de mon cœur et, au même moment, le haut de mon visage voit mes mains qui se déchirent. Le papier se froisse sur la table. Tout est illisible désormais. Cela importe peu. Un sablier sur le bureau se retourne. Je l'observe, alors que les grains commencent à tomber, à la manière dont j'observe ma vie. Le temps passe. S'écoule... S'écroule... Et les grains de sable, doucement, pleuvent les uns après les autres, et je ne bouge pas.
***
Je me rappelle cette vieille histoire imaginée autrefois, celle du petit joueur de flûte qui patiente esseulé devant les Portes de l'Aube. Qu'est-il devenu ?
Poèmes
La force de l’âge
Entre mes doigts, dit-on,
Coule la force de l’âge
Sur mes lèvres, sur mon visage
Dessinée au crayon
Le zénith d’une existence
Le crépuscule d’une croissance
Le début d’une longue pente
Le désamour de mes amantes
Et pourtant, ne suis-je pas fébrile,
Quand je dois être si haut ?
Je me passe doucement au crible
Et j’y vois mille trous en ma peau
C’est donc là, mon summum,
Certainement pas un mont
Ni même une colline de Rome
La hauteur d’un grand garçon
Quand au plus je me déploie
Voilà ce que j’atteins
Rien de plus, rien de moins,
Que mes apparences, mon cœur et moi.
Incertaine, intrigante, se profile
A mes pieds au long d’un fil
La marque des temps à venir
L’unique chemin du dernier soupir
Et, comme chacun, j’avance,
A contrecœur, à contretemps,
Egrainant un à un les ans
Sans mettre un nom à mes errances,
Ainsi, je m’aperçois,
Comme d’autres le dirent autrefois
Qu’au climax de mes pas,
Je suis aussi haut que tout en bas.
Le lac noir
Je vis une main pure et douce
Troubler un lac noir
Des rides parcoururent l’onde
Et au-dessus la lune féconde
Dans la tranquillité du soir
Peignait de ses lueurs rousses
Les contours de la terre
La main caressait l’eau
De ses doigts peignait un visage
Qui s’échouait sur le rivage
En d’interminables assauts
De vaguelettes solitaires
Sous la lumière de craie
Son cheval sabota ses entraves
Et s’enfonça dans les fourrés
Alertée par le son des chaînes brisées
Elle s’approcha l’œil grave
Marqua un temps d’arrêt
S’aperçut de la fuite du destrier
Observa prudemment les alentours
A la recherche d’une menace soudaine
Qui dans cette paix réveillerait la haine
A quelques mètres un bruit sourd
Celui d’une portière claquée
Affola ses sens
Deux phares crevèrent la nuit
Et élancèrent sur ses épaules nues
Leur lumière vive et crue
Elle poussa un long cri
Egaré dans la terre immense
Et le vit s’approcher
Lui et sa main gantée de cuir
Brandissant un poignard effilé
Tout à fait tétanisée
Elle ne put tenter de fuir
Et la main s’abattit sur son corset
Juste entre ses seins
Perçant la peau et puis les os
Elle s’effondra simplement
Sur son torse un long filet de sang
S’entortillait en un court ruisseau
Qui coulait jusqu’au creux des reins
Mimoria sciolta
Mi fughjenu e maghjine
Longu à i ghjorni di a vechjaia
Di e nostre stonde verghjine
Sott'à u celu, sott'à i faii
Ma, Amore, cumu era tù
Per piacè, conta mi li torna
I risalti di a to giuventù
Chì u mo malannu spietatu inforna
Di u to nome solu mi ferma
Una brumula secca è persa
E una musichella inderna
Chì annanna à mo mimoria scarsa
Cum'hè chì di i to ochji
Mi ne scordu à pocu à pocu
Ricordi, n'aghju più chè rochji
Ch'o vecu more à picculu focu
Si cunsuma u mo mondu
Senza ch'o possi fà nunda
Si stringhje u mo circondu
E cusì u pientu abbunda
Scruccone di versi è falsariu di pueti attalintati, m'inframettu, a mascara in faccia, è bramu di l'estru, fussi tragicu, per una stundarella di gloria.
*
Fin'à quandu aspetteremu troppu di dumane, ùn si sà. Forse un ghjornu l'ochji chjuderemu è u fischju di u ventu ci discitterà.
*
Ogni pueta chì s'inframette in a mo mente ci stà cum'è un migrante ghjuntu in 'ssu morganu per u sempre, decisu di impone ci à so stampa. Pienu di fiacca, mette à palesa l'orlu di u mo sapè, induva si sparghjenu a machja di a mo ignoranza, i pruni di a verità, e bugie velenose è i lamaghjoni di l'offese.
Scunfittu, ùn sò cumu scumbulisce mi cù stu invasore svergugnatu chì in duie parolle vultuleghja e credenze di sempre. Duie vie mi parenu apre si. O l'annegu è facciu nice d'ùn avè lu mai intesu, o giru a cricca, sbalancu u cateru, è u lasciu sciallà si là in u campu di u mo pensà.