ANTONI ARCA ET L'ECRITURE PLURILINGUE

PLURILINGUISME ET CREATIVITE : CINQ VERSIONS DE JORDI

DANS LE DROIT FIL DU PROGRAMME MEDI-TERRA

 

Antoni Arca est l’âme du programme MEDI-TERRA ouvert en 2009 et qui se poursuit à travers diverses opérations.

Jordi mis en demeure, rendu possible par une bourse de traduction de la CTC en est une retombéeun auteur plurilingue d’Alghero né en 1956. Ses deux derniers romans viennent d’être publiés par ALBIANA-CCU, en corse (Isula di torre, pesci è ballu tondu, coll. »Calamaii ») et en français (Jordi mis en demeure, coll. « ïles littéraires »), deux traductions par G.Thiers.

La coopération entre Corse et Sardaigne littéraires a débuté dans les années 1990, dès la première génération d’INTERREG et s’est poursuivie depuis, à travers diverses réalisations dans le domaine universitaire, pédagogique et culturel. D’abord portée par un conventionnement formel, cette coopération s’est bientôt inscrite dans une relation renforcée par la fréquentation, les échanges et l’action culturelle fréquemment matérialisée par des initiatives et réalisations communes.

Sans être de langue maternelle sarde, Arca a écrit plusieurs romans en sarde normé (Lingua Sarda Comuna). Il est parmi les intellectuels sardes les plus productifs, bien que la critique dominante néglige trop souvent une oeuvre qui consacre toute sa place à la langue sarde. Depuis la disparition de Larentu Pusceddu en janvier 2016, Arca figure parmi les quelques écrivains sardophones les plus actifs.

Il a publié depuis trente ans plusieurs dizaines d’ouvrages en plusieurs langues et de sujets variés: linguistique, essais, littérature enfantine, poèmes, théâtre et romans.

 

Jordi mis en demeure, le livre traduit en français par G.Thiers s’intitule Domo de Jordi dans la version originale sarde. Comme les nombreux ouvrages d’Arca, l’ouvrage existe en version italienne et catalane. 

Domo de Jordi est né d’un pari, assure le romancier. Il voulait écrire un récit avec Nanni Falconi et Gian Carlo Tusceri pour réaliser une oeuvre trilingue (catalan d’Alghero, sarde logudorese et gallurese). Ses deux amis ont accepté ce projet, à leur avis irréalisable et l’ont mis au défi d’en rédiger le premier chapitre. Ainsi est née l’idée d’un réalisateur catalan faisant escale à La Maddalena puis assigné en résidence surveillée à Tempiu.

Selon les propres termes d’Arca, cette trame et ce type d’écriture à plusieurs mains constituent un véritable « machine creativu… Il a pris plaisir à partager lui-même son récit en trois ensembles : 1) la fiction romanesque du voyage de Jordi Semperé de Barcelone à La Maddalena en passant par Cadaquès et Marseille, 2) le blog «érotique » du photographe de Jordi transformé en « galerie de clichés porno » à l’insu de son patron ; 3) le journal d’une jeune femme enceinte qui accompagne Jordi dans son voyage sarde. En somme, dès la genèse du modèle sarde, une projection de l’auteur dans le triple personnage pseudonymique d’Antonio Corsarcata !

L’ouvrage fait en effet partie du projet ainsi nommé, un challenge littéraire qui associe Corse, Sardaigne et Catalogne dont les noms trouvent un écho dans le patrnyme inventé CorSarCata. Trois réalités linguistiques voisines sont en effet associées dans la création d’œuvres originales. G.Thiers, A.Arca et le Catalan Jordi Buch Oliveravaient en effet initié leur collaboration avec une œuvre d’A.Arca : Tilda de Reni, atora, (Nor, édition de Cagliari associée à Condaghes), un roman disponible en e-book traduit –mais aussi adapté aux réalités socioculturelles de la Corse et de la Catalogne (Quandu sò spenti i lumi (Albiana-CCU).

Rappelons à ce titre que le Domo de Jordi original a inspiré en langue corse à notre Antonio Corsarcata une autre création romanesque : Asciuva ti ne a bocca… chì ùn ti ne tocca (Albiana-CCU, coll. « Calamaii », 2015). Les différences qui signalent ce dernier texte par rapport au modèle sarde sont pour la plupart inscrites dans la sollicitation de réalités culturelles de la Corse à travers différents épisodes et personnages. Citons en particulier les chapitre 1 (« Una furia mediatica ») où interviennent RCFM, la station régionale de Radio France en Corse, et 2 (« Ind’è i Dantoni, Maddalenini), le personnage féminin de Maria Dantoni, le reporter Antonio Pettinelli et bien des développements insistant sur la spécificité corse.

Une période d’incertitudes et d’interrogations a suivi pour Arca la disparition d’êtres chers et de personnalités littéraires de Sardaigne. Il a par la suite repris l’idée structurante du projet Antonio Corsarcata et a remodelé la structure de son texte tout en le réécrivant dans d’autres langues : en catalan d’Alghero puis en italien et en une autre version sarde.

 

Avec Jordi mis en demeure ce sont donc en définitive cinq versions issues d’une même idée créative. Trois en e-book (sarde, aligheresu et italien) et deux version-papier (corse et français).

Ces réalisations sont la suite du programme MEDI-TERRA initié en 2009 et qui se poursuit à travers une coopération régulière des auteurs et éditeurs.

 

ANTONI ARCA ET MEDI-TERRA

 

Antoni ARCA est né le 6 mai 1956 en Sardaigne où il vit et exerce son métier d’enseignant de langues et civilisation ibériques. Il a entrepris d’illustrer l’identité spécifique de sa ville natale, L’Alguer (Alghero), ancienne colonie catalanophone, dans un dialogue fécond avec les ensembles culturels de Catalogne, de Sardaigne et d’Italie. Polyglotte, Arca est aussi à l’aise dans l’écriture poétique que dans le roman, la nouvelle ou le théâtre. Il affectionne en particulier le travail d’écriture avec et pour les publics scolaires, notamment dans le domaine du théâtre.

 

Il a écrit et mis en scène plusieurs pièces de théâtre en italien, sarde et catalan. Dans ces langues, il publie aussi régulièrement des textes en vers et en prose. Opérateur culturel connu, il est l’un des « méditerranéens » qui fréquentent et construisent le territoire culturel de nos dialogues entre voisins.

Licencié en lettres et en pédagogie, spécialiste de langues et de littératures ibériques, il enseigne depuis 1983 et est chargé de cours en Sciences de l’Education à l'université de Sassari. Il a dirigé le secteur langue et didactique du Centre de Services Culturels Société Humanitaire d'Alghero. Il est aussi membre de la rédaction du secteur livres pour enfants aux éditions EDES (Sassari) et Condaghes (Cagliari).

L’un de ses romans : Pâris et ses femmes, (Albiana/CCU 2002, 213 pages) Collection « Isule literarie »a été traduit en français par G.Thiers. Ce dernier a également traduit en corse et fait représenter plusieurs de sestextes dramatiques.

Grâce aux partenariats qu’il a su contribuer à conclure, l’Association de soutien du CCU travaille désormais régulièrement avec des éditeurs de Sardaigne et des pays catalans. Dans cet ordre d’idées, on mentionnera les actions rangées dans le programme Medi Terra qui ont pu aboutir depuis trois ans à plusieurs réalisations de partenariat entre auteurs, libraires et éditeurs de Méditerranée :

Ce dialogue éditorial a pu se réaliser entre : Albiana-CCU (Corse), Condaghes (Cagliari en Sardaigne) et Fonoll (Lerida en Catalogne).

 

Après l’édition de trois romans (sarde, corse, catalan) édités dans chacune de ces trois langues, la coopération s’est faite plus dense avec la création d’un atelier d’écriture littéraire international. Un scénario romanesque a conduit trois auteurs  à écrire un roman en commun et en trois langues (catalan, corse, sarde).

Sur la vie d’un personnage imaginaire, actrice du cinéma muet, s’est construite une narration sur deux époques et quatre lieux: Barcelone, Corse, Sardaigne, Rome. Le climat est celui des débuts du cinéma parlant et des années1920, puis la fin du 20e siècle... Le sujet ? Un jeune chercheur de l’Université de Rome enquête sur cette star déchue et réduite aujourd’hui à tenir la caisse dans un obscur cinéma de quartier, Tilda de Reni. La vie l’a transportée de Corse en Sardaigne et en Catalogne, à Rome et dans l’Italie fasciste. L’universitaire tente de retracer son itinéraire chaotique depuis que se sont pour elle éteints les feux de la rampe. Sont nés ainsi Quandu sò spenti i lumi (Albiana-CCU, 2012) et Tilda de’ Reni (Condaghes, Cagliari, 2013), sous le pseudonyme d’Antonio Corsarcata, donné comme jeune romancier de Méditerranée. ANTONI ARCA EST L’AME DE CE TRIPTYQUE D’ECRITURE.

Cette coopération, commencée en 2014, se poursuit régulièrement. Les 3 situations se retrouvent sur un projet plus original encore: 3 itinéraires narratifs, complémentaires mais résolument différents, adaptés aux différentes personnalités des auteurs et à la spécificité de leurs régions respectives.

Le texte-base est le conducteur narratif fourni par Antoni ARCA –encore lui. Son manuscrit se fonde sur une histoire complexe, truffée d’une foule de faits microscopiques du quotidien mais aussi rattachés au milieu des arts visuels. On y croise des artistes, des starlettes, de grands cinéastes ainsi que des silhouettes tout à fait anonymes. Des gens de mer et des paysans, îliens farouchement attachés à leur terroir et à leurs traditions. Un petit monde tout en contrastes, dominé par l’appât du gain et du profit, la superficialité des rapports humains et la marchandisation des valeurs et de tous les échanges. Des gens déstructurés par un incessant va-et-vient entre des postulations contradictoires, l’amertume de l’exil, la misère et l’hésitation permanente entre des univers culturels trop contrastés. L’action circule entre la Catalogne, la côte de la Provence, la Corse, la Sardaigne et La Maddalena tout particulièrement. Les personnages appartiennent au monde de la production cinématographique où des impératifs financiers écrasent toute autre valeur. Or ces antivaleurs-là sont violemment confrontées à des cultures attachées aux héritages dont certains sont très anciens (comme les vestiges de l’ère nuragique).

Jordi Semperé, cinéaste de renom, se voit commander un film dont la réalisation le conduira, après une traversée mouvementée sur un voilier à l’équipage fantaisiste et inquiétant, de Barcelone à L’île de La Maddalena. Il doit sur l’île sarde présider un festival de cinéma « ethnique », mais un scandale impliquant détournement de statuettes nuragiques en bronze et prostitution va contrarier le déroulement purement artistique du projet.

 

On trouvera ci-dessous un exemple de traduction en français que j’ai réalisée pour la présentation de ce dossier. Il s’agit du tout début du chapitre 1.

 

 

ORIGINAL SARDE

 

– Ti naro chi emmo!

– Ma de ite ti benit custa atza? Chie mi lu podet assegurare a mie, chi non b’apo a perdere dinare?

– Deo, ti lu naro deo!

– Tando!

S’òmine prus giòvanu de sos duos andat a sa bentana, allutat una sigareta e si ponet a pipare. A isse no l’es pràghidu mai de pipare, ma ischit chi su fatu matessi de betare fumu dae buca ponet sos àteros in positzione minoritària. Deo pipo, beto fumu dae sa buca, deo so su fìgiu de su dragone. Si ponet a palas a sa bentana e s’àter’òmine, su prus mannu, cuddu chi est bènidu a pedire dinare, abarrat ispantatadu. Custu minoreddu chi non tenet galu trinta annos betat fogu dae sa buca e sa lughe dae fora chi li est filtrende dae sos pilos biondos e ritzos, paret unu miràculu de deus cunfirmadu dae sos campaniles amachiados de Antoni Gaudí e chi como resultant intrende·intrende in s’aposentu.

– Ite garantias bi podes pònnere?

– S’arte, s’arte mia.

_ ...

Su giòvanu, Marc Joan Peralta Blanc, si ponet a s’iscrivania sua, istudat sa sigareta e cramat dae s’interfono: – Maria Pilar!

– Luego, faeddende a s’àteru, – Como dito una botza de contratu a sa segretària, si tue ses de acòrdiu lu mandamus a su  notàriu e sighimus a dae in antis, e si nono…

Su betzu, un òmine de unos chimbanta annos, peladu che unu benugru ma galu forte de carena, si setzet e isetat.

Sa segretària, Maria Pilar, issa puru aparentat unos chimbanta annos, piliruja, bassiota e prena de ermosura. Giughet paperi e pinna e est lestra a iscrìere. Marc Joan, su fìgiu de una dinastià longa longa de mercantes e bancheris bartzelloninos, cumintzat a faeddare.

– Dae una parte Marc Joan, etzètera, dae como su finantziadore, e dae s’àtera Jordi Sampere Queró, dae como su regista, cumbenent su chi sighit.

Jordi Sampere, iscurtat sena cumprèndere, sos ogros suos sunt amirende sas bator puntas de sa Sagrada Famìllia; s’est imaginende un’atzione tzinematogràfica fantasy. Un’òmine lestru a si suitzidare nd’est bogadu a subra a subra ma, cando giai at serradu sos ogros suos e non li faltat nudda pro si nche imbolare, una manu lu firmat, aberret sos ogros e unu betzigheddu totu biancu li faghet sinnu de lu sighire. Est su fantàsima de Antoni Gaudì. Li mustrat una ghennighedda e la passant umpare. Como sunt a intro de sa Sagrada Famìllia, ma intro de totu su chi sos turistas no ant pòdere bìdere mai, ca sunt intrados in s’ànima de sas pedras.

 

TRADUCTION FRANÇAISE

 

– Je te dis oui !

– Pourquoi es-tu si décidé? Qui peut m’assurer que je ne vais pas y perdre d’argent?

-C’est moi !

– Alors...

Le plus jeune des deux va jusqu’à la fenêtre, allume une cigarette et se met à la fumer en tirant de logues bouffées.  Il n’aime pas fumer, mais il sait bien que le seul fait de cracher de la fumée met son vis-à-vis dans une position inférieure. Je fume, je crache de la fumée par la bouche, je suis fils d’un dragon ! L’autre, le plus âgé, celui qui est venu demander de l’argent, est décontenancé. Cet homme jeune qui n’a même pas la trentaine, crache de la fumée par la bouche tandis que la lumière venue du dehors, filtrée à travers ses cheveux blonds et raides, lui donne l’air d’une apparition divine dont témoignent les deux clochers d’Antoni Gaudi qui se croisent en entrant dans la salle.

  • Mais quelle garantie peut-on avoir ?
  • L’art, l’art qui est le mien.

Le jeune, Marc Joan Peralta Blanc , s’installe au bureau, écrase sa cigarette et appelle à l’interphone :  – Maria Pilar!

Puis, s’adressant à l’autre :

– Si tu en es d’accord, je fais faire immédiatement par la secrétaire un projet de contrat que nous expédions au notaire et tout ira bien, sinon…

Le vieux, un homme qui doit avoir la cinquantaine, pas un poil sur le crâne mais de forte carrure, attend sans rien dire. La secrétaire, Maria Pilar, la cinquantaine elle aussi, rousse, petite et mignonne, s’active à la rédaction du projet. Marc Joan, fils d’une longue dynastie de banquiers et commerçants barcelonnais, lui dicte les termes du contrat:

  • Entre Marc Joan, et cetera, en tant que producteur, d’une part, et Jordi Sampere Queró, en tant que réalisateur, d’autre part,  il est convenu ce qui suit …

Jordi Sampere écoute sans comprendre. Son regard contemple avec admiration les quatre flêches de la Sagrada Famìllia. Il est en train d’imaginer une action cinématografique fantasy. Un homme a voulu se suicider en se jetant de là-haut, mais alors qu’il a déjà les yeux clos et que tout est réuni pour réussir son coup, une main l’arrête, il ouvre les yeux et une forme humaine au teint livide lui fait signe de le suivre. C’est le fantôme d’Antoni Gaudì. Il lui indique une porte qu’ils franchissent ensemble. Ils sont maintenant au cœur même de la Sagrada Famìllia, l’intérieur que ne peuvent voir les touristes parce qu’ils se trouvent dans l’âme des pierres.

 

Marc Joan est en train de parler chiffres, pourcentages, hypothèques, patrimoine littéraire…

Concrètement, si tout va bien, outre les sommes dont il fait l’avance, Marc Joan percevra cinquante pour cent sur la totalité du bénéfice, mais si ça tourne mal, la maison Peralta Blanc obtiendra tous les biens, mobiliers et immobiliers de Jordi Sampere Queró, outre la totalité des droits d’exploitation des oeuvres réalisées et de celles à venir, y compris le patrimoine familial, c’est-à-dire le copyright de l’oeuvre littéraire de Jordi Sampere Mestre, père du réalisateur, considéré comme le poète et romancier le plus grand de la littérature catalane des années 1960 et 1980, dont on a donné le nom à des avenues, des places, des écoles et des théâtres dans toutes les régions du principat de la Catalogne et à propos de qui quatre  immenses maisons d’édition se disputent le privilège de publier l’ensemble de son oeuvre.

– D’accord, dit Jordi,  mais tu vas me laisser carte blanche: c’est moi qui choisis le sujet, la mise en scène, les acteurs, tous les professionnels dont j’ai besoin, les lieux de tournage, c’est moi qui décide…

– Naturellement bien sûr évidemment! La maison Peralta Blanc fixe une seule limite : le film sera terminé dans un délai de deux ans: tournage, montage et tout le reste. Et six mois après, projection en salle. Si ce n’est pas le cas, trois ans après la signature chez le notaire, on appliquera les pénalités  prévues au contrat.

Un nuage a changé l’éclairage dans la pièce: au dehors la Sagrada Famìllia a perdu toute lumière. Jordi acquiesce et serre la main du jeune homme. Désormais, il a l’argent pour son filmu mais il n’est pas satisfait, il se sent mal à l’aise en songeant qu’il est le plus vieux, que l’autre est riche et qu’il pourrait être son fils et qu’il est en train de le prendre pour un crétin.

 

Annie’s Island, Annie’s Stevens,

Isula di torre, pesci è ballu tondu

L’héroïne du nouveau roman d’Antoni Arca, Annie’s Island (Nor edizioni) est un personnage ambivalent. Une jeune britannique qui prépare sa licence de Lettres modernes d’Europe doublée d’une jeune phénicienne naufragée dans la région sarde du Sulcis.

On pourrait croire à deux histoires bien distinctes se déroulant sans jamais se croiser. L’une dans l’Angleterre actuelle, l’autre dans la Sardaigne d’il y a trois mille ans. Pourtant le récit nuragique est en réalité le roman autobiographique écrit par la grand’mère de la jeune anglaise, un texte qui lui est laissé en héritage. La lecture paraît devoir se dérouler sur deux niveaux mais on ne tarde pas à découvrir que le récit nuragique n’est rien moins que l’allégorie d’un terrible épisode survenu à Annie les années 1950, alors que, âgée d’une quinzaine d’années, elle vivait en Sardaigne avec son père ingénieur des mines. L’homme avait été enlevé mais comme il ne pouvait payer la rançon, ses ravisseurs l’avaient renvoyé chercher cet argent en Angleterre, la jeune fille étant gardée en otage durant plus d’un mois.

Le lecteur, selon ses goûts, pourra choisir de lire l’ouvrage comme une sorte de roman d’aventures, un répertoire de rites antiques de Méditerranée ou comme une réflexion sur la protohistoire de la Sardaigne. Ces trois choix sont également possibles et valables. Le livre est aussi disponible en catalan d’Alghero sous le titre Annie’s Stevens et désormais en corse, traduit par G.Thiers : Isula di torre, pesci è ballu tondu.